Nous ne tirerons pas à boulets rouges sur les Blacks Blocs

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Nous ne tirerons pas à boulets rouges sur les Blacks Blocs

Contrairement au gouvernement, nous ne légitimons pas la violence. Force est de constater qu’à Notre-Dame des Landes, les militants non-violents ont été gazés. Les chants, les chaînes humaines, l’intergénérationnel, rien n’a résisté au rouleau compresseur de l’Etat. Seuls, les militants offensifs, résistant aux militaires, ont été efficaces pour lutter contre l’avancée des militaires. Le pouvoir a donc légitimé la violence, du moins son efficacité pour résister. A la violence de l’Etat, qui est la première violence, celle qui en appelle d’autres, les Zadistes offensifs ont lutté pied à pied avec l’énergie du désespoir, malgré un rapport de force qui leur était défavorable : 2500 militaires mobilisés, utilisation de drones, de blindés…et des milliers de grenades de toutes sortes lancées contre les résistants. Drôle d’époque qui nous rappelle qu’historiquement, dans les conflits entre le capital et le travail, c’est l’armée qui opère, charge et protège les puissants. Nous avons eu cependant l’impression que la Zad fut un test grandeur nature pour le pouvoir, un exercice pour tester la volonté zadiste en milieu rural puis pour liquider un stock de grenades périmées. Faut bien utiliser les armes payées par le contribuable. On est dans le développement durable, il faut éviter le gaspillage. En plus, si on peut blesser quelques manifestants au passage, pourquoi s’en priver ?

La manifestation du Premier mai 2018, c’est le pendant de la Zad mais côté urbain. D’ailleurs, on pourrait se poser la question suivante : pourquoi mobiliser 2500 militaires pour déloger 200 Zadistes à NDDL et seulement 1500 policiers à Paris, sachant qu’il y aurait de la baston ?

Mais revenons à nos moutons, pas ceux de la Zad mais à ceux du Premier Mai. Les gens comme dirait l’imbécile de Mélenchon qui a prétendu que les Blacks Blocs étaient d’extrême droite (vieille rengaine stalinienne), en ont ras-le-bol des manifs ballons qui servent uniquement à compter la présence militante et les divisions syndicales. Pendant des années, nous avons été bercés par « Olélé, olala, on est toujours là, avec la CGT » et autres niaiseries du même style pour faire peuple. Puis, changement d’airs après les manifs des retraites, on est passé à « C’est dans la rue que ça se passe ». Et bien justement, avec les Blacks Blocs, c’est dans la rue que ça se passe. Cette manifestation du Premier Mai 2018 a ringardisé au possible la manifestation syndicale. Tout d’abord, un tiers des manifestants s’est retrouvé hors cortège syndical, c’est à noter. Finies les sauteries staliniennes ! L’argument éculé qui consiste à dire que les violences ont occulté les revendications des travailleurs est d’un pathétique. Les revendications sont occultées par le gouvernement, lui-même, qui renvoie les syndicats, jouer seuls, dans leurs cours.

Nous nous sommes toujours opposés à la violence mais nous la comprenons. C’est no futur pour la jeunesse ouvrière et le déclassement pour les enfants des classes moyennes. Alors, on attend sagement que Macron, ancien ministre de Hollande, continue à faire des cadeaux aux plus riches ?

Mercantilisme, aliénation, soumission aux actionnaires, au patronat et à l’Etat, inégalités qui s’accroissent, pollution qui met en danger l’humain aujourd’hui (7 millions de morts par an dans le monde) et les générations futures. Le sursaut ne viendra pas des politiciens qui ont un raisonnement à court terme et défendent les intérêts des grands de ce monde. Le sursaut ne viendra pas des syndicats qui ont failli et jouent leur survie en essayant de maintenir les subventions étatiques afin de sauvegarder le corps des 50 000 permanents français, étant donné que les cotisations des adhérents représentent la portion congrue du budget syndical.

Alors que faire ? Autre chose, c’est sûr. Les guerres picrocholines entre partis politiques écoeurent de plus en plus les citoyens. Les élections ne changent rien, ou empirent une situation déjà peu réjouissante : la preuve avec les députés Macron, godillots de leur mentor. Parallèlement, tout comme 1968, les jeunes (et moins jeunes) sont matraqués, gazés, humiliés…leurs revendications sont foulées au pied. En 1964, paraissait le livre de Bourdieu et Passeron, « Les Héritiers ». Ce bouquin faisait le lien entre inégalités et classes sociales ; il nous montrait comment le système scolaire reproduisait les inégalités. En 2018, la situation n’a que peu évolué. Et ce n’est pas avec Blanquer que l’école changera car les élites tiennent à maintenir leurs pouvoirs. La reproduction sociale les conforte dans leur caste. Aussi, une jeunesse, moins fortunée mais instruite aussi, remet en cause cet ordre social. Nous avons la mémoire des vaincus et aux matins du grand soir succèdent surtout les matins blafards qui nous cafardent, comme la lune de Léo Ferré.

Alors la guérilla urbaine, les affrontements…ne représentent qu’un épiphénomène de la lutte des classes. Nous n’hurlerons pas avec la meute des scandalisés des violences du Premier Mai. Ils y sont pour beaucoup dans la dégradation de la situation sociale, hypocrites qu’ils sont. Macron, au premier chef, en premier de cordée. Cependant qu’il nous soit permis d’avoir un doute et nous pensons que le pouvoir a une arrière-pensée et entend utiliser cette violence pour la retourner contre ceux qui en font usage. On nous assène que les Blacks Blocs sont très organisés, qu’ils utilisent un langage crypté, qu’ils ont des ramifications internationales…Connaissant bien le système policier, nous savons que le cryptage n’a pas de secret pour les experts de la défense nationale. Nous connaissons la propension de la police à infiltrer tout groupe qu’il considère comme dangereux. Il suffit de consulter les archives de police : affaire Métivier à la CGT en 1909, étudiants infiltrés en 1968 par le SAC et les flics…

Bien entendu, nous savons que la plupart des personnes qui ont participé au cortège de tête sont des militants de bonne foi, pleins d’espérance dans une nouvelle forme d’action puisque la non-violence n’a servi à rien jusqu’à présent…Mais, l’Etat est très fort et a toujours une petite idée derrière la tête. La manipulation est l’un de ses points forts. Après les barricades de la rue Gay-Lussac à Paris en 1968, le général De Gaulle a rallié ses partisans pour une manifestation géante sur les champs Elysées, le 30 mai…et en juin, les derniers soubresauts révolutionnaires se firent sentir. Les stations essence furent réapprovisionnées et les parisiens purent partir en week-end puis en vacances…Puis les élections vinrent…et l’on connaît la suite. Pour le gouvernement, l’important, c’est qu’il n’y ait pas de mort. La bataille de l’opinion publique est très importante. Nous le voyons de même dans l’enjeu qui se joue en ce moment avec les cheminots.