Les belliqueux sont là

La grande majorité de nos proches qui ont vécu directement la Seconde Guerre mondiale ou la guerre d’Algérie  sont morts. Pendant quelques décennies, nous avons vécu une époque de paix militaire et non de paix intérieure. Deux ou trois générations sans mettre les pieds dans les tranchées, dans les colonies et sans carte de rationnement suffisent pour conclure à tort que les guerres appartiennent au passé ; qu’elles sont typiques des endroits éloignés de nous, un cauchemar improbable pour une société aussi « avancée » que la nôtre… dans laquelle nous nous soucions du respect des droits de l’homme, de la santé de nos concitoyens. Mais voilà, la guerre en Bosnie et celle d’Ukraine viennent se rappeler à notre bon souvenir. Les massacres à Gaza aussi.

Les enseignants apprennent à leurs élèves à rejeter la guerre, en peignant des cours d’école bien intentionnées avec des peintures murales représentant des colombes et des rameaux d’olivier, mais il ne leur est jamais venu à l’esprit d’enseigner aux enfants quoi faire lorsque la guerre est vue depuis la fenêtre de leur maison et non depuis les écrans de télévision. Les enfants comme leurs parents rêvent de devenir millionnaires en jouant à euromillions; la guerre, pour eux, pour nous, est aussi virtuelle qu’un jeu vidéo. La guerre est une triste réalité qui s’impose de plus en plus à l’évidence. Les tambours de guerre sonnent et se rapprochent. Eux, nos jeunes, ont déjà un ticket réservé pour participer activement au conflit de guerres à venir.

L’armée n’est plus l’histoire ennuyeuse que les grands-parents racontent toujours. Le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a annoncé que le service militaire obligatoire devait être rétabli pour « les jeunes, les femmes et les hommes ». La commissaire parlementaire chargée de l’armée allemande, Eva Högl, a déclaré que « mettre fin au service militaire était une grave erreur ». Patrick Sanders, chef d’état-major du Royaume-Uni, va plus loin et a récemment appelé à la création d’une « armée citoyenne » pour compléter les forces professionnelles afin d’atteindre 120 000 militaires en trois ans. La France parle uniforme à l’école et ce n’est pas un hasard ; le SNU est toujours à l’ordre du jour.

Les dépenses de guerre au niveau mondial n’ont cessé de croître au cours des huit dernières années ; le continent européen, notre continent, celui des « droits de l’homme », celui de l’État-providence, étant celui qui a le plus augmenté ses dépenses en armes et en fournitures de guerre. En un an, les dépenses de guerre en Europe ont augmenté de 13%, mettant en avant des pays comme la Finlande (augmentation de 36%), la Lituanie (27%), la Suède (12% de plus que l’année précédente) ou la Pologne (augmentation de 11%). Si l’Arabie Saoudite a augmenté son budget militaire de 16 % par rapport à 2013, l’augmentation de la Chine a été de 63 % ! Le monde se prépare à la guerre ; l’Europe aussi.

Le gouvernement suédois a averti sa population qu’elle devait se préparer à une « guerre totale ». Erik Kristoffersen, chef des forces armées norvégiennes, a indiqué que dans deux, peut-être trois ans, elles devront faire face à une invasion russe : « il reste peu de temps ». Grant Schapps, secrétaire britannique à la Défense, a averti que la Grande-Bretagne « doit se préparer à de nouvelles guerres contre la Chine, la Russie, l’Iran et la Corée du Nord au cours des cinq prochaines années » et appelle à une augmentation substantielle des dépenses militaires. De nombreux citoyens polonais ont peur d’une invasion russe imminente, et ce d’autant plus qu’il a été divulgué que le président biélorusse, Alexandre Loukachenko, avait informé son allié russe, Vladimir Poutine, que les mercenaires du groupe Wagner voulaient « marcher vers Varsovie » et entrer sur le territoire polonais, camouflés parmi le groupe de migrants qui entrent dans le pays en provenance d’Ukraine.

Il est très probable que, dans quelques années, nous serons en guerre et que nous devrons pleurer la mort de nos jeunes en faisant d’interminables heures supplémentaires dans une usine d’armement. Ce sera le moment où nous cesserons de voir l’État comme cet outil neutre qui paie notre retraite, nous offre altruistement le « meilleur système de santé au monde » et légifère des lois justes, sensées et nécessaires qui nous protègent de l’homme d’affaires exploiteur et de l’ex-mari violent… L’âme de l’État est son armée et pour le haut commandement militaire, il n’y a que trois situations possibles : la guerre, l’après-guerre et l’avant-guerre. C’est le secrétaire britannique à la Défense qui le dit : « nous sommes passés du monde d’après-guerre au monde d’avant-guerre (…) nous avons bouclé la boucle ».

Nous sommes à l’aube d’une nouvelle phase guerrière : une guerre hybride, une cyberguerre…

Déléguer toutes les décisions qui affectent nos vies aux institutions étatiques signifie vivre dans un cycle sans fin de conflits armés. La guerre est synonyme de mort, de mutilation, de viols massifs, de destruction de nos maisons, de faim et de froid… Voter aux élections, c’est se tirer une balle dans le pied. L’amour de la patrie est le moteur de la mort prématurée de votre enfant.

Le rejet des institutions étatiques constitue, au contraire, la plus forte opposition à la guerre.

C’est en temps de paix que l’on peut promouvoir la paix. En tant de guerre les comportements deviennent irrationnels. Il nous reste une petite fenêtre de tir pour impulser un grand mouvement populaire pour la paix. Après ce sera trop tard.

Ni dieu ni maître ni tribun ni prophète : révolution anarchiste !

Ty Wi (GLJD)