Le libertaire d’octobre 2023

La campagne électorale pour les européennes de juin 2024 va à nouveau se distinguer par sa profonde pauvreté intellectuelle et politique. Nous espérons cependant que le record d’abstention explosera car la politique politicienne n’est que tromperie et nous n’avons rien à en attendre. Nous aurons le cirque électoral habituel avec la recherche de soutiens pour d’éventuelles investitures, une recherche de profils, des têtes d’affiche pour les partis…mais cela n’évitera pas d’atteindre les plus hauts niveaux d’une misère intellectuelle récurrente. Une misère multidimensionnelle qui semble n’avoir aucune limite. Dans cette dégradation asymptotique, les problèmes que la classe politique aborde occupent leur temps, dans des proportions mystérieuses, entre leurs égoïsmes et leurs intérêts privés. Les travailleurs, eux, passeront après. De toute façon, les élections passent, les problèmes demeurent.

On en arrive à constater que de plus en plus de gens sont dépourvus de sens critique. Les médias jouent un rôle essentiel en ce sens car ils constituent un incroyable dissipateur d’énergie politique ; ils décervellent et manipulent. Maintenant que tout se veut progressiste, que tout est imprégné d’identité et d’émotion, le citoyen inoculé de démocratisme est enfin devenu le parfait cancre de la liberté de pensée. Un nouveau niveau de séparatisme culmine et se dissout dans les réseaux sociaux bien qu’ils ne soient pas collectifs et que, oh surprise !, ils vous donnent toujours, spéculativement, ce que vous voulez entendre quand certains semblent voir partout des complots. Il s’agit, oui, de tout séparer et de générer l’illusion de complétude à partir de la simple perception de soi et du manque de mémoire le plus absolu. Diviser pour mieux régner et commander. Oublions les grands combats sociaux du passé. Amnésie, j’écris ton nom.

Aussi atroce soit-elle, il ne fait aucun doute que l’idée selon laquelle certaines souffrances d’autrui sont dramatiquement répandues et méritées, résultat d’arguments aussi étranges que déconnectés de la réalité, fait de plus en plus son chemin ; l’empathie s’amenuise. Derrière chaque oui mais, il y a aussi généralement une ignorance prétentieuse et une peur atavique bien induite.

Beaucoup de choses pourraient changer en peu de temps grâce à l’éducation si elle n’était pas prisonnière des deux faces d’une même médaille qui s’accusent mutuellement d’endoctrinement. Toute personne d’un certain âge sera capable de reconnaître une telle chose dans les livres pour enfants, dans un sens ou dans un autre, et s’en souviendra et la reconnaîtra également parmi les siens. Mais si nous prônions une éducation centrée sur l’homme et la préservation de l’environnement, dans laquelle les valeurs de coopération et d’entraide prédomineraient sur celles de compétition et d’égoïsme, sans doute que nous serions accusés d’endoctrinement tant par la droite et l’extrême-droite que par la gauche.

Et le fait est qu’un objectif si retentissant et si simple dans sa formulation est déjà récupéré parce que sa mise en œuvre réelle pointe nécessairement vers des concepts inacceptables pour conserver l’état actuel des choses. A contrario, les libertaires se battent pour la préservation des besoins fondamentaux des gens, par exemple : santé, soins, éducation, alimentation, logement, énergie,… sans vouloir en tirer profit à titre personnel. Nous entendons orienter et structurer, bien plus localement, l’économie (et l’emploi)) pour les travailleurs et l’écologie. Cela implique, entre autres, d’autres modes de consommation, d’autres relations commerciales, d’autres paramètres financiers et économiques, un redéploiement des métiers, une simplification technique qui nous donne une plus grande robustesse face à une obsolescence programmée cynique… Mais, comment vraiment prendre soin des gens et de la planète peut-il paraître si subversif ?

Parfois, il est difficile de savoir si les récits que l’on nous sert à longueur d’infos sont des parodies ou sont bien réels; avec un sens critique, les doutes s’éclaircissent. Les politiciens ont intérêt à croire ce qu’ils disent et ainsi ils mènent une guerre culturelle avec leurs armes de communication tout comme les religieux. Ou peut-être veulent-ils simplement que l’électeur les croie. Le fait parfois que ceux bien intentionnés qui sont allés voter avec leur pince-nez pour tenter d’arrêter un prétendu fascisme depuis 2002 en France, récemment en Espagne, relève d’un profond manque d’analyse de la question électorale.

Maintenant qu’il est presque impossible de faire la distinction entre la droite et la gauche de gouvernement, ni entre leurs pathétiques sous-ensembles disjoints, si jamais cela était possible, de nouveaux faux conflits sont favorisés en essayant de confondre ce qui est remis en question avec la manière dont cela est fait. Le déni et le complot sont d’immenses tonneaux sans fond dans lesquels les gardiens de la morale peuvent vous pousser sans scrupules scientifiques. La pensée critique et libre est agaçante, sans parler de la pensée systémique (révélatrice) si puissante, car elle demande du temps et des efforts qui sont d’autant plus rentables qu’ils sont commercialisés. La pensée unique se déguise et se présente comme la pilule confortable du consensus… A nous de démystifier cela. Européennes ou pas, les élections, c’est du bidon.

Concernant les retournements de veste, il n’est pas inutile de rappeler qu’il y a peu, des députés de droite (Renaissance…) et du R.N. s’en sont pris aux enseignants et qu’après l’assassinat de Dominique Bernard, professeur de lettres de 57 ans, à Arras (trois ans après l’assassinat de Samuel Paty), ces mêmes politiciens ont encensé les enseignants qui étaient finalement le dernier rempart contre l’obscurantisme. Politique politicienne quand tu nous tiens. Honte aux blaireaux.

TY oui (GLJD)