Pour la dignité de la jeunesse en 2021 et après
Notre conception de la dignité découle de nos convictions libertaires, et non d’aucun conditionneur juridique ou politique ni de faiseurs d’opinion, qui ne sont que des impositions visant à réifier nos vies et à les adapter aux intérêts économiques d’une minorité dictatoriale.
Ni l’État, ni les lois, ni aucun ordre économique ou politique ne peuvent changer nos idées et nos aspirations à développer une société digne d’être appelée société.
Nous n’avons pas besoin de réglementer légalement nos outils de lutte, car nous avons la capacité légitime et éthique de changer tout ce que nous jugeons injuste. La grève indéfinie, le boycott, les initiatives autogérées dans le domaine économique, sanitaire et éducatif, les réappropriations d’espaces et l’expropriation des entreprises, doivent être nos alliés et moyens d’action directe pour commencer à créer une société juste, libre et égalitaire.
Face au déviationnisme idéologique et pratique, nous continuons à défendre l’action sans intermédiaires (Action directe) sur tous les fronts de la lutte émancipatrice. Quand les gens sont licenciés de leur travail, quand les soi-disant personnes dépendantes sont jetées dans la misère, quand les enfants et adolescents ont faim, quand les jeunes ne peuvent pas travailler, quand les propriétaires expulsent les gens de chez eux et quand tant d’injustices sont subies, vient le temps de l’action directe et de l’anarchisme/anarcho-syndicalisme, et ce moment est venu.
Pour pratiquer l’action directe, il faut briser les chaînes dialectiques de la morale dominante, qui n’est rien de plus que la justification de la soumission d’une majorité à une minorité sans scrupules, comme le confirment les nombreux cas de corruption et tous les actes de ce type peu connus et surtout peu condamnés par la justice du pouvoir.
Dans le cirque politique actuel, un nouvel acteur, appelé LREM, est apparu, qui a adapté ses revendications initiales au jeu politique qu’il assume de plus en plus avec davantage d’intensité, le « en même temps », s’éloignant ainsi des fins qu’il prétendait défendre dans un premier temps. C’est la conséquence inévitable de la politique politicienne.
Le réformisme ne sera jamais un moyen de lutte émancipatrice, et essayer d’embarquer la société dans un processus de changement partiel légalisé et réglementé n’est rien de plus que de soumettre la société aux nouvelles conditions et exige que l’ordre actuel se développe contre ceux qui tentent de le changer en en supposant son existence comme inévitable. C’est pour cela que la gauche et la droite, au niveau économique et social, c’est un peu blanc bonnet et bonnet blanc. LREM ne déroge pas à la règle. La nov’langue a de vieux habits.
Les causes de la misère
Le retour de plans de sauvetage, qui est de facto la dette publique, implique certaines politiques antisociales, et avec la crise sanitaire où l’on voit les gens demander davantage d’autorité par peur du Covid avec son corollaire moins de libertés, le gouvernement français va nous concocter des mesures encore plus drastiques que d’habitude au sortir de cette crise. Déjà, de nombreux étudiants font la queue pour manger, les chômeurs longue durée fréquentent assidûment les restos du cœur, le secours populaire…La réforme de l’assurance-chômage va accroître encore la pauvreté de nombre de chômeurs…Ainsi, les budgets du gouvernement préfèrent mettre en œuvre une politique favorisant les entreprises alors que les travailleurs de la première ligne ne sont toujours pas reconnus. Personne ne devrait alors être surpris à ce stade par cette pratique d’appauvrissement des groupes de population les plus défavorisés, puisque le capital vit du capital et gouverne pour le capital.
Insécurité de l’emploi et jeunesse
Déjà élevé avant l’arrivée de la pandémie de Covid-19 en Europe, le taux de chômage des moins de 25 ans a encore augmenté du fait des mesures de confinement dans la plupart des pays de l’Union européenne : manque de petits boulots pour les étudiants, intérimaires supprimés en premier, jeunes pas employés ou ne trouvant pas de premier job…. En novembre 2020, 17,7 % des jeunes Européens étaient au chômage.
L’Espagne est de loin le pays le plus touché par le chômage des moins de 25 ans, qui atteint 40,9 % des jeunes en septembre 2020 ! En ce qui concerne la France, son taux de chômage a passé la barre des 20 % chez les moins de 25 ans, atteignant 22,1 % en novembre 2020. Elle se trouve ainsi au-dessus de la moyenne européenne et de celle de la zone euro. L’Italie, quant à elle, affiche un taux de chômage de 29,5 % pour cette catégorie de jeunes. Et l’on s’étonne que les jeunes de 25 ans se tournent vers l’extrême droite ?
La destruction brutale d’emplois dont nous souffrons signifie que nos aînés aident souvent leurs enfants et demeurent le pilier économique de leurs proches. Parallèlement à l’autre bout du monde du travail, les seniors sont poussés vers la sortie ; alors la réforme des retraites proposée par le comité « d’experts » du gouvernement, c’est doublement idiot. Les plus anciens se retrouvent en pré-retraite ou au chômage tandis que les plus jeunes n’ont pas accès à l’emploi.
Après les dernières réformes du travail, la négociation collective a subi une détérioration absolue, les accords d’entreprise prévalent sur les accords collectifs, les ruptures conventionnelles (souvent licenciements déguisés) sont montés en flèche ; la négociation autonome est donc imposée aux travailleurs face au patron.
Ces situations de légalisation de la précarité de l’emploi ont un plus grand impact sur les jeunes, et ce sont les jeunes à qui nous voulons rappeler quelques-uns des principaux maux du marché du travail que le gouvernement, les employeurs et les syndicats majoritaires ont conçus pour eux.
Entre 1975 et 2000, le taux d’emploi en temps partiel a été multiplié par deux, passant de 8,3 % à 17,3 %. Depuis les années 2000, il évolue peu. Si l’on observe le nombre d’emplois (et non plus les taux), on note que le temps partiel augmente assez régulièrement jusqu’à 2019 et que c’est surtout l’emploi à temps complet qui connaît des variations fortes. L’augmentation des CDD, la destruction des contrats collectifs au profit des contractuels participent à cette évolution négative pour les salariés.
Le taux de précarité a atteint 13,5 % en 2018, contre 12,1 % en 2014. Il s’agit essentiellement de personnes en contrat à durée déterminée et d’intérimaires…cette insécurité de l’emploi se traduit aussi par des décès : accidents du travail, maladies… Près de 656 000 accidents du travail ont été reconnus en 2019, soit une augmentation de 0,6 %, selon un bilan de l’assurance-maladie. Tant et tant de maux que nous pourrions référencer et documenter…
Appel à la jeunesse
Après ce qui a été dit précédemment, nous voulons appeler à une réflexion sur certaines questions.
Nous souffrons d’une réalité économique imposée, légalisée et incontournable. Les nouvelles options de renouveau politique et démocratique devraient influencer ces questions et proposer des «feuilles de route» claires qui rendent visible le niveau structurel auquel elles seront élaborées, compte tenu de la hiérarchie juridique du système dans lequel elles opèrent. Lancer d’éventuels messages génère des illusions irréalistes de changement, et ils reflètent très bien ce qu’est le parlementarisme, un moyen de manipulation de masse. Pour le dire plus clairement, les élections passent et pas grand-chose ne change, surtout pas l’exploitation structurelle.
Il faut aussi se demander quel est le modèle de société que l’on souhaite, si l’on veut revenir au contexte socio-économique des trente glorieuses qui ne furent réellement glorieuses que pour ceux qui avaient de l’argent (c’est aussi l’exode rural et le déracinement de nombreux paysans qui se retrouvèrent à la chaîne…par exemple), ou si l’on envisage une critique et un changement global de société.
Même les nouvelles options de changement juridique et démocratique de l’époque d’après-guerre ont accru leur ouverture à la lutte syndicale organisée, soit en raison de l’intérêt de forger une plus grande mobilisation sociale favorable, soit parce qu’il est vraiment compris que le syndicalisme est utile pour faire face à une lutte de la nature économique et sociale. Nous dirons seulement à ce stade que l’anarcho-syndicalisme continue d’être le modèle d’organisation sociale le plus approprié pour faire face à une lutte économique, comme en témoignent ses pratiques, dans lesquelles il n’y a pas de place pour trahir la volonté de la classe ouvrière et ses intérêts. L’anarcho-syndicalisme n’est à la remorque d’aucun parti politique ; comme c’est même une organisation concurrente des partis politiques puisqu’elle aspire à gérer directement la société, ce qui rend inutile les partis.
Pour tout ce qui précède, nous appelons les jeunes à réfléchir à la rareté des structures sociales autogérées et émancipées qui répondent réellement aux besoins sociaux actuels, à tous les niveaux.
-Nous appelons les jeunes à s’organiser sur des bases anarchosyndicalistes fédérées en unions syndicales, et à s’organiser solidairement, face à tous les fronts de la lutte émancipatrice.
-Nous appelons les jeunes à s’organiser en dehors des modèles de renouveau politique et démocratique, à ne pas hésiter dans leurs objectifs ou leurs buts, et à évaluer si les possibilités de changement qui se sont répandues ces derniers temps par divers moyens sont réalistes ou de simples discours qui s’inscrivent dans le cadre juridique dont ils font déjà partie.
-Nous appelons les jeunes à rejoindre l’organisation anarchiste spécifique, à développer leurs propres préoccupations et capacités sans jamais soumettre leur sens de la justice et leurs valeurs humaines et sociales à tout type de populisme réformiste.
-Nous appelons les jeunes à se battre pour ce qu’ils considèrent comme une vie digne et un bien-être social dans la liberté. Jeune, ne te laisse pas sacrifier sur l’autel des profits!