Sodoma ou l’hypocrisie de l’église catholique

Sissi Corfou

Sodoma ou l’hypocrisie de l’église catholique

Que d’amitiés particulières au Vatican ! L’auteur de « Sodoma, Enquête au cœur du Vatican », a vécu longuement en immersion dans le cloaque épiscopal. Mais quelle investigation au final ! Frédéric Martel, après une enquête approfondie, nous décrit avec moult détails la communauté gay  ou plutôt les différentes catégories de gays, et raconte l’histoire de cette composante majoritaire du collège cardinalice et du Vatican.

De nombreux prélats et cardinaux sont donc de « la paroisse », expression qui indique « les inclinations » de ceux qui sont de la famille homosexuelle. Ce livre qui se lit facilement est un véritable pavé dans la mare des grenouilles de bénitiers : côté pile, nous voyons des hommes pieux, du moins c’est ce qu’ils donnent à voir en public mais côté face, en privé, c’est toute autre chose. Les professions de foi sur le célibat et les vœux de chasteté, c’est pour les autres, la galerie. Cette grande majorité qui côtoie le pape à Rome prône une morale corsetée mais vit avec un compagnon ou se paie les services de prostitués, des escorts, souvent des migrants. Nous sommes dans une homosociabilité généralisée. Le problème n’est pas de jeter la pierre aux ecclésiastiques homosexuels mais de dénoncer leur hypocrisie : rejet du préservatif alors que le sida a fait des millions de victimes, misogynie, stigmatisation du « relâchement des mœurs », dénonciation de la masturbation (un acte désordonné…). Cette église doctrinale prône la chasteté stricte avant le mariage et proscrit l’homosexualité considérée comme une dépravation. L’Eglise s’oppose de même à la pilule, à l’avortement et prône la chasteté pour les jeunes, les couples divorcés ou homosexuels. C’est dire le décalage entre les mœurs d’aujourd’hui dans la population en général et la doctrine véhiculée par les instances vaticanes. Cette église archaïque est à contre-courant de la société contemporaine, en décalage permanent. Aussi, peu vivent dans la pauvreté.

L’auteur défend une thèse : l’église est devenue sociologiquement homosexuelle et en imposant une continence contre-nature et une culture du secret, elle est pour une part responsable des dizaines de milliers d’abus sexuels qui la minent de l’intérieur. Le danger et le piège d’une telle thèse sont de lier homosexualité et pédophilie, pas que nous ne franchirons pas. Il ne semble pas que ce soit le dessein de l’auteur, non plus, mais de nombreux détracteurs de l’homosexualité pourraient s’engouffrer dans cette brèche pour y effectuer un amalgame ravageur.

Fédéric Martel énonce un certain nombre de règles visant Sodoma. Il constate que « Plus un ecclésiastique est véhément contre les gays, plus son obsession homophobe est forte, plus il a de chances d’être insincère et sa véhémence de nous cacher quelque chose ». En clair, pour se protéger et que personne ne découvre son homosexualité, le prélat homosexuel a tout intérêt à s’attaquer à l’homosexualité en général et se faire le défenseur de la tradition et de l’hétérosexualité. Certains vivent leur homosexualité dans la souffrance, d’autres la vivent tranquillement mais dans l’hypocrisie et c’est cette dernière qu’il faut dénoncer et torpiller.

Peut-être que ce livre participe d’un règlement de compte entre clans homosexuels au sein de l’Eglise et qu’une certaine pression va s’exercer finalement sur le pape François pour qu’il fasse le ménage…Nous le verrons à terme ; en attendant, quelle jubilation de confondre tous ces hypocrites, ces moralistes éhontés, ces homosexuels de salon qui jouissent en interdisant aux autres leurs plaisirs coupables : faites ce que je dis, pas ce que je fais.

Si François est bien parmi les folles comme « Platinette » ou la « Montgolfiera », il va avoir bien du mal à se libérer de sa cage : « Les rumeurs, les médisances, les règlements de comptes, la vengeance, le harcèlement sexuel sont fréquents au saint-siège. La question gay est l’un des ressorts principaux de ces intrigues ». (cinquième règle de Sodoma)

Mais au-delà de cette emprise homosexuelle au saint-siège, l’auteur nous parle de scandale de la banque du Vatican et de l’extrême droite. Un petit détour s’effectue au Chili entre autres où l’on voit Pinochet entouré d’homophiles…la princesse Gloria von Thurn und Taxis dans son antre qui est le repaire de la frange la plus conservatrice de l’Eglise catholique allemande, entourée d’une nuée de gays…et pour la France, un clin d’œil aux tenants de la Manif pour tous…

On y apprend que les Arabes sont très prisés au Vatican : « Dans la prostitution à Rome entre les prêtres et les escorts arabes, deux misères sexuelles s’accouplent : la frustration sexuelle abyssale des prêtres catholiques trouve un écho dans la contrainte de l’islam, qui rend difficile pour un jeune musulman les actes hétérosexuels hors mariage ». (Huitième règle de Sodoma) Les prêtres sont les clients les plus fidèles des escorts. Pourtant ces relations homosexuelles sont sacrilèges autant pour les musulmans que pour les catholiques. Double hypocrisie ! Pour des raisons d’anonymat, les prêtres cherchent surtout des migrants. Mais la prostitution concerne aussi les Latinos, les Roumains, les Africains sans papiers. Les migrants, les sans-papiers, c’est plus facile, plus discret : « Vous avez déjà vu un migrant aller dénoncer quelqu’un au commissariat de police ? ».

Les prostitués musulmans se dédouanent comme ils peuvent avec leur religion. Le fait d’être « actif » semble les rassurer sur le degré de leur « faute » vis-à-vis de l’islam…

Dans cet ouvrage, nous croisons de même la route de Marcial Maciel, ce légionnaire du Christ au Mexique, ami personnel du pape Jean-Paul II. Nous avions déjà chroniqué dans le libertaire, les aventures de ce prêtre qui a recruté des milliers de séminaristes et des millions de dollars de fonds. Comme quoi les comptes secrets, les holdings, les propriétés sont essentiels pour ces serviteurs de Jésus. Celui qui prêche la chasteté avait deux femmes et six enfants. Plus grave, le prédateur Maciel aurait agressé sexuellement des dizaines d’enfants et d’innombrables séminaristes : plus de deux cents victimes sont aujourd’hui recensées. Deux de ses fils ont aussi porté plainte contre lui. Bel ami de Jean-Paul II. Il faudra attendre 2005 pour que ce sinistre individu soit démis de toutes ses fonctions par le pape Benoit XVI. Cependant, il ne sera pas dénoncé à la justice par l’église et coulera une fin de vie paisible aux Etats-Unis, profitant de son immense fortune. Tant qu’aux légionnaires du Christ, aujourd’hui, certains continuent leurs turpitudes…

Nous passerons sur la confrérie gay à Mexico, à Cuba… et ce que Benoît XVI a osé pour la consécration de Georg Gänswein comme archevêque. Une cérémonie grandiose pour son protégé ! Digne d’une cérémonie royale anglaise. Les coureurs de caleçons draguent sans pudeur,  séminaristes, gardes suisses…tandis que d’autres s’activent autour de réseaux de prostitution. Quel sacerdoce catholique ! De même coucher avec son secrétaire privé est un modèle omniprésent dans l’histoire du Vatican. La treizième règle de Sodoma est aussi explicite : « Ne cherchez pas quels sont les compagnons des cardinaux et des évêques ; demandez à leurs secrétaires, leurs assistants ou leurs protégés, et à leur réaction vous connaîtrez, la vérité ».

L’écrivain s’est appuyé sur 1500 entretiens pour son ouvrage : parmi lesquels 41 cardinaux, 52 évêques et monsignori, 45 nonces apostoliques, secrétaires de nonciatures ou ambassadeurs étrangers, 11 gardes suisses, et plus de 200 prêtres catholiques et séminaristes. C’est dire l’ampleur des informations enregistrées.

Nous ne pouvons que conseiller la lecture de ce livre de 630 pages. C’est une des plus belles illustrations  contemporaines  de l’hypocrisie de l’église catholique. En tant que libertaires, nous avions, depuis plus d’un siècle déjà,  à la suite de Sébastien Faure, dénoncé l’imposture de la religion. Avec ce livre, les procès de prêtres pédophiles…nous ne pouvons qu’être confortés dans un « Ni dieu, ni maître », encore et toujours, intemporel.

Patoche (GLJD)

PS : Pour les religieux, l’acte sexuel doit servir non pas au plaisir mais à la reproduction. Les religions sont toutes arriérées sur les sujets qui ont trait à la sexualité.