Fin avril 2024, Joe Biden a signé la loi autorisant un programme d’aide américaine d’une centaine de milliards de dollars pour l’Ukraine, Israël et Taïwan. Même les républicains partisans de Trump ont voté pour. Il faut dire que l’économie américaine s’appuie largement sur le secteur de l’armement et les gains sont substantiels : pas question de fâcher les gros bonnets du secteur industrialo-militaire, certainement de gros contributeurs pour les campagnes électorales.
Les deux tiers de cette enveloppe seront consacrés à l’achat de nouveaux équipements militaires pour les trois pays susmentionnés, ainsi qu’à l’augmentation de la production américaine. Pour résumer, selon le Wall Street Journal, plus de 60 milliards de dollars du nouveau programme d’aide se transformeront en juteuses affaires commerciales internes au pays. Les affaires sont les affaires comme disait Octave Mirbeau.
La décision américaine est donc une formidable promesse d’argent facile pour l’industrie américaine de l’armement, dopée par les conflits en cours. Comme quoi, la guerre profite aux marchands de canons. Jusqu’ici, note le Wall Street Journal, les entreprises de défense et de sécurité Lockheed Martin (productrice des très « fameux » F-35 Lightning II) et RTX ont été les principales bénéficiaires des 30 milliards de dollars de contrats fédéraux attribués pour approvisionner l’Ukraine et, dans la foulée, reconstituer les stocks d’armes américains. D’autres entrepreneurs, dont General Dynamics, et L3Harris ont annoncé en avril de fortes ventes trimestrielles. Plus la guerre durera plus les profits seront énormes. C’est pourquoi les Américains annoncent la couleur : « Nous ne pouvons pas laisser l’Ukraine tomber, car si cela se produit, il y a de fortes chances que l’Amérique doive s’impliquer, non seulement avec notre argent, mais aussi avec nos troupes », assure Hakeem Jeffries dans une interview à l’émission « 60 Minutes » sur CBS. Et de jouer sur les peurs car selon ce leader démocrate après l’Ukraine, la Russie menacera d’autres pays devenus indépendants après l’effondrement de l’Union soviétique et qui font désormais partie de l’OTAN. C’est la restauration de l’URSS que vise Poutine. Et d’autres responsables américains lui emboîtent le pas : « Nous ne pouvons pas les laisser tomber » sinon « il y a de fortes chances que les Etats-Unis doivent s’impliquer » militairement.
En clair, les dépenses militaires américaines représentent un investissement pour la paix future en stoppant Poutine dès aujourd’hui.
Mais au-delà de cette conception militariste, il faut bien comprendre les enjeux économiques. En 2023, Lockheed Martin a dégagé un bénéfice net de 6,9 milliards de dollars américains, en hausse de 21%.
Jim Taiclet, le PDG de Lockheed Martin, a selon Zonebourse déclaré aux investisseurs de l’entreprise qu’il s’attendait à ce que les demandes de budget présidentiel pour l’exercice 2025 et le financement supplémentaire vers l’Ukraine, Israël et Taïwan constituent une base solide pour la croissance future de notre entreprise au cours des prochaines années. La croissance se fait sur les morts des autres, en dehors des USA. Et les politiciens américains sont futés et argumentent en indiquant qu’ils préfèrent aider les pays belligérants comme l’Ukraine plutôt que d’envoyer des hommes au front. Ouf se disent les Américains ! Coup double : on sauve nos gars et c’est bon pour l’économie donc pour les emplois.
Les planqués de l’arrière et les profiteurs de guerre sont des phénomènes intemporels. Durant la Première Guerre mondiale, les Etats-Unis sont entrés tardivement en guerre aux côtés de la France et la Grande-Bretagne, histoire de laisser ces pays « alliés » s’épuiser mais pas trop et profitant de l’aubaine, certaines entreprises et sociétés américaines ont accru leurs revenus et bénéfices jusqu’à 1 700 %. Des fortunes se font souvent en périodes de guerre, c’est pour cela qu’elles sont si cruciales pour ceux et celles qui veulent engranger le maximum de profits sur le dos des soldats qui se font trouer la peau pour des industriels. On croit mourir pour la patrie mais on meurt pour des industriels.
Aujourd’hui, les entreprises de la Défense, Lockheed Martin et RTX en tête, utilisent le système des rachats de leurs propres actions pour s’enrichir à bon compte. Avec les bénéfices tirés de la guerre, elles ont investi dans les rachats d’actions. Ce procédé, de plus en plus utilisé dans le monde des grosses entreprises, leur a permis d’accroître leur part de capital propre et donc la gouvernance sur leur entreprise, tout en accroissant les bénéfices par actionnaires restants. En toute légalité ; l’argent n’a pas d’odeur. Et pourquoi les riches ne s’enrichiraient-ils pas encore davantage sans rien faire puisque la loi le leur permet.
Le procédé est lucratif et ne nécessite ni investissement ni recherche. Par un tour de passe- passe, Lockheed et RTX ont racheté 19 milliards de dollars d’actions l’année dernière. Lockheed a racheté 1 milliard de dollars supplémentaires au premier trimestre 2024, Northrop Grumman a racheté près de 350 millions de dollars et General Dynamics plus de 100 millions de dollars. C’est du circuit court et du très juteux.
Les profiteurs de guerre n’ont jamais eu d’éthique. Ceux qui faisaient du marché noir durant la seconde Guerre mondiale, voire collaboraient, ont terminé la guerre pleins aux as. C’est la logique du capitalisme qui remercie ses défenseurs.
Et les politiciens demandent toujours aux salariés de se serrer la ceinture…Il faut dire que les travailleurs sont les plus nombreux à mettre la main à la poche. Dommage qu’ils n’utilisent pas leurs pieds pour botter le cul des profiteurs de mort.
Ty Wi