De la loi répressive au contrat fédéraliste

De la loi répressive au contrat fédéraliste

Loi naturelle

 Par « loi naturelle » nous n’entendons pas évoquer les lois immuables ( ?) qui régissent le mouvement de l’univers. Nous ne voulons parler que de la loi d’association réglant, plus ou moins harmonieusement, les rapports humains. Cette loi qui conduit des communautés humaines à s’entraider, à se protéger mutuellement et à chercher à vivre ensemble le plus convivialement possible. L’élaboration d’une telle harmonie se heurte principalement à deux obstacles majeurs : la hiérarchie et la possession. Aussi cette « loi naturelle » n’a jamais pu être pratiquée qu’au sein de groupements humains où n’existaient ni la notion de chef ni celle de propriété individuelle.

La grande duperie de tous les régimes autoritaires – qu’ils soient ouvertement totalitaires ou qu’ils se prétendent démocratiques – est de présenter l’inégalité de conditions comme la manifestation d’une loi naturelle. Plutôt qu’une loi naturelle, il s’agit d’une « loi placebo » destinée à sécuriser le peuple et à l’inciter à la résignation ou à l’acceptation passive du fait établi.

Loi autoritaire

Il est faux de prétendre que la loi protège la liberté des individus. Chaque loi, au contraire, entrave ou supprime une liberté. Jamais les lois n’ont supprimé une servitude. Elles l’ont organisée en système. En tout temps et en tout lieu, la loi a toujours été le reflet fidèle des mentalités, des préjugés, des croyances, des intérêts et des ambitions des dirigeants. « La loi est, comme le dit, Lacaze-Duthiers, un chantage qu’exerce le riche sur le pauvre et l’imbécile sur l’homme intelligent. »

« Dans la société actuelle, démontrait Aristide Lapeyre, il existe un « contrat social ». Je n’ai pas été appelé à en discuter les termes. Je ne l’accepte pas. Même quand une clause m’est favorable. Ce contrat, on me l’impose. Selon les circonstances, j’en dénonce l’arbitraire. Je lutte pour son abolition. Faible, j’emploie la ruse. En attendant que plusieurs faiblesses s’unissent pour refuser la reconnaissance des « lois », je désobéis seul, en évitant : le gendarme, le juge, le soldat. Ce contrat unilatéral est basé sur la force ou le sophisme. Sa seule réalité, réside dans l’ignorance des individus à qui on l’impose. »

Le contrat fédéraliste

Quand les anarchistes proposent un « contrat social », ce n’est évidemment pas de ce modèle qu’il s’agit. Car le contrat fédéraliste libertaire s’oppose au contrat répressif de l’Etat et s’articule autour d’un libre engagement des individus les uns envers les autres.

Le contrat social de l’Etat s’impose à tous (enfin, presque !) sans que le consentement préalable des assujettis soit requis. Le contrat libertaire repose sur le libre consentement de tous : ce n’est ni un ukase, ni un catéchisme. La notion de libre consentement implique une adhésion volontaire au principe d’entraide et de solidarité.

Toute adhésion, même volontaire, d’un individu à un groupe suppose nécessairement quelques concessions, quelques renonciations à des préférences personnelles. Mais, paradoxalement, le sacrifice de certaines libertés mineures accroît – par l’association – la possibilité, pour l’individu, d’exercer pleinement sa liberté.

Le contrat fédéraliste libertaire lui seul préconise l’auto-administration du peuple tout entier, la gestion directe de l’économie (production, distribution, services) par les travailleurs ainsi qu’une étroite coordination des rouages économiques et sociaux.

Débarrassé des structures autoritaires (centralisme démocratique cher aux marxistes ou fédéralisme étatique américain, hiérarchie, délégation de pouvoir, gouvernement mondial, etc.) le fédéralisme ne peut, ne doit avoir d’autre organisation que libertaire sous peine de n’en être qu’une caricature : « Le fédéralisme nous appartient, nous pouvons l’affirmer, non par veine gloriole ou par appropriation, mais parce que tout dans son fonctionnement et son architecture est une correspondance organisationnelle de nos théories. » (Maurice Laisant)

Dans ce domaine, plus encore que dans tout autre, méfions-nous des imitations.

A.P. (le libertaire)