Covid et environnement

Criseclime

Covid et pollution

En France, près de 100 000 décès seraient attribués chaque année aux particules fines issues de la combustion des énergies fossiles, ça fait beaucoup et le nombre de décès dus à cette cause augmente chaque année. La pollution aux particules fines est responsable de 20% des décès dans le monde.

A l’heure de la Covid, les concentrations importantes de particules fines sont soupçonnées d’augmenter sa transmission ainsi que sa gravité. Sans compter l’apport de sable du Sahara qui accroît les problèmes respiratoires et on ne parle pas de sa nocivité radioactive : merci les essais nucléaires français au bon vieux temps des colonies. Le réchauffement climatique entraîne une désertification constante qui à son tour amène des tonnes de poussière de sable. Ce qui a pour conséquence d’augmenter les risques de mortalité cardiovasculaires due à des problèmes respiratoires.

D’autre part, plus de 2500 espèces animales et végétales sont menacées d’extinction en France, notamment les oiseaux qui perdent de plus en plus leurs habitats et sont victimes de l’agriculture intensive. L’érosion de la biodiversité gangrène nos milieux naturels. Nous connaissons les causes de cette casse de la biodiversité : artificialisation des sols, utilisation de pesticides, cours d’eau saccagés (algues vertes, pollution industrielle des rivières…).

Le problème écologique n’est pas nouveau, déjà Murray Bookchin, précurseur des questions écologiques modernes posait les bonnes questions dans les années soixante: « EN TERMES PLUS CONCRETS, quels enjeux l’écologie sociale propose-t-elle à notre époque et à notre avenir ? En multipliant les points de contact avec la nature, sera-t-il possible de parvenir à un nouvel équilibre, moyennant le délicat ajustement de nos pratiques agricoles, de nos zones urbaines et de nos technologies aux conditions naturelles d’une région et de ses écosystèmes? Peut-on espérer «gérer» l’environnement naturel par une rigoureuse décentralisation de l’agriculture, qui permettrait de cultiver la terre comme s’il s’agissait d’un jardin dont une faune et une flore diversifiées maintiendraient l’équilibre ? Ces changements exigeront-ils la décentralisation de nos villes sous la forme de communautés de taille moyenne, créant ainsi un nouvel équilibre entre villes et campagnes ? De quelle technologie aura-t-on besoin pour atteindre ces objectifs et éviter que se poursuive la pollution de la terre ? Quelles institutions seront nécessaires pour créer une nouvelle sphère publique, quels rapports sociaux devront s’instaurer pour que se développe une nouvelle sensibilité écologique, quels styles de travail rendront le labeur humain créatif et ludique, quelle taille et quelle population les communautés devront-elles avoir pour que la vie soit à l’échelle humaine et contrôlable par tous ? Quelle sorte de poésie appellera tout cela ? Les questions concrètes – écologiques, sociales, politiques et de comportement – affluent tel un torrent, jusqu’ici contenu par les contraintes des idéologies et les habitudes de pensée traditionnelles. »

C’est un penseur qui réfléchit sur le temps long et s’inquiète de ce que nous allons léguer à nos enfants et petits-enfants : « La dissémination irresponsable des déchets radioactifs, de pesticides très persistants, de résidus de plomb et de milliers de substances toxiques ou potentiellement toxiques dans les aliments, l’eau et l’air : l’expansion des villes en vastes zones urbaines concentrant des populations comparables en nombre à des nations entières ; l’intensification de la pollution sonore, les tensions créées par les encombrements, la vie concentrationnaire et la manipulation des foules ; l’accumulation gigantesque d’ordures, de détritus, d’eaux usées et de déchets industriels ; la saturation des routes et des rues par le trafic automobile ; le gaspillage effréné de matières premières précieuses ; la défiguration de la terre par la spéculation immobilière, les mines, l’exploitation forestière et la construction routière – le dommage ainsi causé à la planète en une génération dépasse de loin celui de milliers d’années de présence humaine. Une telle accélération augure sinistrement de ce qui attend la génération à venir. »  Une harmonie ne s’établira dans notre relation avec le monde naturel que si l’harmonie règne dans la société.

Pour lui, la notion de domination de la nature par l’homme découle de la domination réelle de l’humain par l’humain : « Ce n’est pas seulement dans la nature que l’être humain a créé des déséquilibres, c’est aussi, et plus fondamentalement, dans sa relation avec son prochain et dans la structure même de la société ; et les déséquilibres qu’il a provoqués dans le monde naturel résultent de ceux qu’il a provoqués dans la société. »    En d’autres termes : « L’obligation faite à l’humain de dominer la nature découle directement de la domination de l’humain sur l’humain. »

Et d’enfoncer le clou sur les effets pervers d’une société basée sur la hiérarchie et la domination : « Aux énormes problèmes de fond que crée l’ordre social actuel s’ajoutent ceux créés par une mentalité qui a commencé à se développer bien avant la naissance du capitalisme, et que ce dernier a entièrement absorbée. Je veux parler de la mentalité structurée par les notions de hiérarchie et de domination, où la domination de l’homme sur l’homme a donné naissance au concept de domination de la nature comme « destin » – voire comme nécessité de l’humanité. Que la pensée écologique ait commencé à faire passer l’idée que cette conception de « destin » de l’humanité est pernicieuse, a tout lieu de nous réconforter. »

Et c’est très bien de préciser cela car les récupérations politiciennes autour de l’écologie se font jour jusqu’à l’extrême droite. Le R.N. maintenant se verdit et s’accorde à vanter le mérite des circuits courts, des relocalisations (produisons français avec des travailleurs français à bas mots). Elle récupère même par l’intermédiaire de son spécialiste environnemental, l’eurodéputé Hervé Juvin, le vieux slogan « vivre et travailler au pays » des années 1970. Les hommes « aspirent à vivre », « dans leur pays, dans leur région ». Marine Le Pen veut suspendre l’installation des grandes surfaces commerciales et désengorger les villes au profit des campagnes…Bref les questions que Bookchin appelaient environnementales par opposition à l’écologie sociale et libertaire, peuvent être récupérées par n’importe qui, n’importe quel parti politique.

C’est pourquoi les libertaires doivent aller au-delà de ces questions pour dénoncer les dominations, les hiérarchies et le capitalisme y compris d’Etat.

Qu’on ne s’y trompe pas, l’extrême droite identitaire, même verdie, fera toujours de l’écologie nationaliste, « une écologie civilisationnelle et « enracinée » qui défend « la diversité des modes de vie, des traditions, des cultures ». La récupération du thème écologiste par l’extrême droite se fera autour des atteintes à la santé humaine par l’hypermétropolisation et l’hypermobilité, les diverses pollutions et l’abandon du climato-scepticisme. Encore quelques années et peut-être verrons-nous une branche identitaire antinucléaire.

La « Loi climat » se discute au parlement mais il n’est pas exclu que cette loi accouche de mesurettes. La crise Covid va permettre aux politiciens de se retrancher vers l’incertitude économique qui ne permet pas d’impacter encore davantage des secteurs touchés par cette crise. Les écologistes de droite et LREM (à gauche aussi) veulent démontrer leur sérieux en se voulant conciliant avec les acteurs économiques…Du déjà vu qui mène à l’immobilisme et au conservatisme des lobbies.

Pour notre part, l’écologie sociale libertaire ou éco-anarchisme s’occupe d’écosystèmes dans lesquels les choses vivantes sont interdépendantes et jouent des rôles complémentaires en perpétuant la stabilité de l’ordre naturel. Elle traite donc de l’équilibre dynamique de la nature, de l’interdépendance du vivant et du non-vivant, les êtres humains faisant eux aussi partie du monde naturel. En fait il est impossible de séparer les problèmes écologiques des problèmes sociaux, donc de l’organisation de la société dans sa globalité afin de maintenir le maintien de l’équilibre et de l’intégrité du tout.

L’action écologique est fondamentalement une action sociale. Ou bien nous nous attaquerons directement aux racines sociales de la crise écologique actuelle, ou bien nous glisserons vers le totalitarisme.   Si le mouvement écologiste n’embrasse pas le problème de la domination sous tous ses aspects, il ne contribuera en rien à l’élimination des causes profondes de la crise écologique de notre époque. S’il en reste à une lutte réformiste contre la pollution ou pour la conservation de la nature – l’ «environnementalisme » – sans prendre en compte la nécessité d’une révolution au sens le plus large, il servira seulement de soupape de sécurité au système actuel d’exploitation de la nature et des hommes. Les anarchistes proposent donc  de s’organiser sur des bases humanistes et libertaires et agir dans un esprit de communauté et d’entraide.

Patoche (GLJD)