Législatives : le pari réussi de l’abstention
Avec une abstention de 57,4%, les politiciens élus, quel que soit leur bord, n’ont pas de quoi pavoiser. Ce second tour des législatives du 18 juin 2017 restera dans les annales. Ce n’est pas tant le nombre de novices qui est important quant au renouvellement de l’Assemblée Nationale mais leur illégitimité à parler au nom du peuple. Les nouveaux venus feront comme leurs aînés et verront comment le milieu du pouvoir et de l’argent corrompt. Ce qu’ils n’ont pas analysé. Ils auront beau vouloir moraliser la vie publique, c’est le système même qui est vicié. Ils se feront une clientèle, effectueront quelques arrangements entre amis et placeront ces derniers à des postes clefs afin de se faire réélire ou tenter de l’être. Leurs aînés, les Fillon et ceux du Modem qui ont trempé dans les emplois fictifs… se sont fait prendre. Mais pour quelques-uns de pris, combien continuent en toute impunité à jouir de privilèges légaux, ou non d’ailleurs, car la légalité ne fait rien à l’affaire.
La légitimité des petits nouveaux ? Mais elle ne vaut rien ou si peu. Quand 440 députés sont élus ou réélus par moins de 25% des électeurs de leur circonscription, c’est que les gens disent leur ras-le-bol des personnalités politiques. Ils n’ont plus aucune confiance dans les députés et ils ont bien raison. Cette méfiance et cette désillusion sont confortées par un nombre record de bulletins de votes blancs ou nuls de l’ordre de 10% ! La représentation politique en a pris une claque, et une bonne.
Les libertaires auraient voulu lancer une grève générale des urnes qu’ils n’auraient pas mieux réussi. Depuis des décennies, nous n’avons de cesse de clamer que les élections sont faites pour le maintien du système en place avec reconduction des privilèges pour ceux et celles qui en bénéficient. Du patron au politicien. Sans compter les faiseurs d’opinions à la solde de ces derniers.
L’abstention fait donc tâche dans le paysage électoral. D’autant que tous les partis sont touchés par cette abstention record. Au premier chef, la LRM, qui comptait rafler plus de 400 sièges selon les estimations mais ne comptera au final que 308 sièges. Au Havre par exemple, dans la 8ème circonscription, si le communiste Jean-Paul Lecoq est élu au second tour, c’est avec une abstention de 64,84%. De même pour la députée L.R, Agnès Firmin Le Bodo, qui gagne la 7ème circonscription avec un taux d’abstention de 62,93%…Ce sont des mal élus comme la plupart de leurs condisciples.
Mélenchon essaie de récupérer les abstentionnistes qui auraient fait une grève générale civique. Pour lui, c’est donc une abstention active…qui se retrouvera dans la rue pour lutter contre les futurs mauvais coups du gouvernement Macron. Nous souhaitons qu’il ait raison. Pour notre part, nous constatons que le film « les bronzés » a fait plus d’audience que la soirée électorale. Les tirades de Clavier et Blanc font davantage marrer que les inénarrables politiciens sur les plateaux de TV, les soirs d’élection…C’est peut être mieux ainsi. Nous constatons de même que l’importante offre de candidats aux élections n’influe nullement sur le taux de participation. Nous avions constaté le même phénomène lors des élections TPE. Avec pléthore de candidats et d’organisations syndicales dont deux CNT, SUD, le syndicat des Corses…le taux de participation avait été de 8% ! Les gens ne votent donc pas plus quand il y a une multitude d’organisations politiques ou syndicales qui se présentent au suffrage des électeurs. C’est souvent l’intérêt qui les guide. Si le travailleur sait que son vote ne changera rien à sa vie, tout au moins à ses conditions de travail, à son quotidien, il ne votera pas. Trop longtemps, le système a fonctionné sur la délégation de pouvoir. Votez pour moi, je réglerai vos problèmes…Du coup, les travailleurs ont pris l’habitude de déléguer et de laisser d’autres agir à leur place. Quand d’autres agissent à votre place, c’est en fonction de leurs intérêts pas forcément des vôtres. La non délégation de pouvoir, voilà la voie à suivre pour que les gens retrouvent le chemin de leur souveraineté politique, dans le sens noble du terme. C’est au niveau du contrôle des délégués, des mandats révocables, de la transparence des informations que les libertaires doivent faire valoir leurs propositions.
Faute de mieux en attendant que cela se passe dans la rue, car l’essentiel n’est pas de voter mais de lutter, nous disons encore bravo aux abstentionnistes, enfin ceux qui comptent se mobiliser dans les mois à venir pour changer le monde.