Gilets jaunes, rouges, verts, roses ou K-Way noir, de nombreux citoyens sont pour que ça pète. Mouvement social ou révolte, ce sont bien des gens qui en ont marre de galérer à la fin de chaque mois ou plutôt dès le 16 du mois. C’est en cela que la lutte des classes n’est pas absente du mouvement des gilets jaunes. C’est en cela aussi que les libertaires ont toute leur place dans cette révolte car c’est au sein de celle-ci que de nouveaux rapports sociaux s’élaborent. Pour autant, nous n’opposons pas une France qui serait citadine et une France qui serait périphérique. Les problèmes de pouvoir d’achat sont communs aux salariés des villes et à ceux des campagnes même si ces derniers sont plus impactés par l’utilisation obligatoire d’un véhicule pour se déplacer ou par l’élimination des services publics.
Pour les citadins, la nouvelle plaie du gouvernement Macron, c’est l’emploi systématique de l’informatique pour toute démarche administrative, ce qui exclut d’emblée ceux qui n’ont pas d’ordinateur ou les personnes âgées dans leur ensemble.
Avec les gilets jaunes, ce qui est sûr, c’est que la question sociale est revenue sur le devant de la scène. Aux participants de cette aventure à ne pas se laisser embrigader par les fascistes. Nous sommes avec les gilets jaunes mais restons sur nos gardes quant au développement de la situation. Lors de révoltes, nous savons très bien que « la foule » peut fluctuer. On a vu des électeurs du Front Populaire en 1936 soutenir le parti de Doriot (ancien dirigeant du Parti Communiste), parti fasciste, dans la foulée. Nous avons vu des centaines de milliers de personnes applaudir Pétain en 1940 et De Gaulle, quatre ans après, avec très certainement un public légèrement différent, mais quand même. Après les barricades de 1968, les Français ont voté en masse pour la droite. Donc, nous nous méfions et défions des mouvements de foule, dans l’action et au niveau électoral. La versatilité des gens est bien connue.
L’avantage de focaliser sur la question sociale, thème sur lequel les libertaires sont à l’aise, c’est de mettre la question identitaire au second plan. C’est aussi pour cette raison que les libertaires doivent être présents entre autre chose dans les cortèges de gilets jaunes ou sur les ronds-points. Cela nous permet d’intervenir quand des militants R.N. essaient de faire reprendre leurs slogans nauséabonds : « on est chez nous… ». Socialisme ou barbarie…nous dirions plutôt : émancipation ou réaction.
Pour David Graeber, professeur à la London School of Economics: « Depuis 2008, les gouvernements injectent dans le système de l’argent neuf qui tend à affluer vers les mains de ceux qui détiennent déjà des actifs financiers et de leurs alliés technocratiques des classes managériales. En France, bien sûr, il s’agit très précisément des macronistes. ». Voilà qui a le mérite d’être clair, c’est pourquoi la caste au pouvoir a intérêt à y rester en essayant de soumettre les autres. Nous sommes de ceux qui prônent l’égalité économique et sociale donc à l’opposé du pouvoir financier.
Ce même pouvoir essaie de piéger les syndicats de travailleurs. Après leur avoir demandé d’appeler au calme avant la manifestation du 8 décembre 2018, il va les embarquer dans un simulacre de Grenelle version 2018 pour canaliser la colère des gilets jaunes. La CGT a bien senti le piège et ne veut pas servir d’alibi. Pas sûr que les syndicats sortent grandis de ces discussions dont les rênes sont tenues par l’Etat, bras armé du patronat. La collusion syndicale avec le gouvernement et le patronat devient patente.
L’image de Macron est fortement dégradée : arrogance, formules blessantes, non prise en compte de la colère initiale des gilets jaunes, condescendance, gardien de l’orthodoxie capitaliste, répression aveugle qui va lui revenir en boomerang…
Ses propositions du lundi 10 décembre 2018 risquent de faire un flop car elles ne répondront pas à l’urgence sociale que traduit le mouvement des gilets jaunes. En attendant, ni sauveur ni tribun, les gilets jaunes n’auront que ce qu’ils prendront.
Patoche (GLJD)