
Faire la guerre à la pauvreté
Pauvreté et dépenses militaires sont liées. En 2023, 650 000 personnesont basculé dans la pauvreté. Nous en sommes arrivés à dix millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Un exploit dont les politiciens parlent peu, eux qui ont la gamelle bien remplie. Non seulement des mesures pour lutter contre la pauvreté n’ont pas été prises mais d’autres mesures (loi Kasbarian, loi dite « plein emploi »…) ont accentué la pauvreté. Barnier, Bayrou et maintenant Lecornu ont dramatisé la situation des déficits et de la dette. Du coup la pauvreté est passée au second plan. Pire, en gelant les prestations sociales en 2026, la pauvreté va augmenter mécaniquement d’autant que les mesures d’économie en déremboursant ou baissant des médicaments vont accentuer cette spirale, cet engrenage dans la pauvreté pour de plus en plus de Français. Si on y ajoute l’augmentation des consultations médicales, la fin du reste à charge zéro, le gel des prestations, le doublement des franchises médicales, les transports sanitaires…, on se dirige vers un non-soin généralisé à court terme pour les plus pauvres voire les classes moyennes. Ce risque de renoncement aux soins pour des questions d’argent n’est pas une vue de l’esprit mais la réalité qui va advenir pour les plus défavorisés. On est pauvre quand on ne peut pas se loger décemment, quand on ne peut pas se nourrir correctement, quand on n’a pas accès aux soins, quand on est privé d’accès aux services publics, quand on se restreint sur tout. La pauvreté, c’est une maltraitance, une atteinte à la dignité, c’est l’esclavage ajouterait Bakounine. Ce sont les moqueries des fascisants « c’est Nicolas qui paie », ce sont les discours stigmatisants et prêchi-prêcha contre les pauvres qui pullulent sans honte sur les réseaux sociaux d’extrême-droite. L’Etat et les fascisants aiment à individualiser la misère, à la renvoyer à la responsabilité et culpabilité au niveau de chaque famille, chaque individu pour mieux dédouaner la violence institutionnelle (étatique) responsable au final des situations de misère.
Pendant ce temps, on ne touche pas aux revenus du patrimoine, à l’impôt sur la fortune etc. Mais par ailleurs, on ponctionne de plus en plus de milliards pour les dépenses guerrières, pour les marchands de canon qui ne sont que des marchands de mort, mais de la mort des autres, pas de celle des profiteurs. Les budgets militaires mondiaux ont progressé de 9,4% en 2024 (chiffre du Sipri) et l’Europe qui entend se réarmer, ce qu’elle n’a jamais cesser de faire d’ailleurs, s’accorde pour mobiliser 800 milliards d’euros d’ici 2030.
La France consacre 413 milliards d’euros aux militaires dans le cadre de la loi de programmation militaire d’ici à 2030. Et notre beau pays aimerait allouer 3% du PIB, soit près de 100 milliards par an après 2030. Les sommes sont vertigineuses quand on sait le nombre de pauvres dans notre pays et le délitement de nos services publics. Dassault jubile avec des commandes de Rafale pour les dix années à venir. Les carnets de commande des usines d’armement saturent. Les bénéfices par action des valeurs européennes de défense, si la trajectoire se maintient à ce rythme, devraient augmenter de 30% d’ici à 2027. Se cachant derrière le concept de souveraineté nationale qui serait un bien commun, les industries d’armement poussent à la roue en invoquant leur engagement dans une économie de guerre.
Alors, et les anarchistes là-dedans. Quelle position peut-on adopter. Il n’est pas inutile de rappeler que pacifisme ne signifie pas abdication absolue devant l’agression et qu’il ne se limite pas au refus passif de la violence. Ce refus doit être actif et constructif.
Les anarchistes, conscients que le choix entre violence et non-violence ne peut se définir que confronté aux circonstances particulières, ont toujours été partagés à ce sujet. Malatesta jugeait nécessaire l’usage de la violence contre l’autorité tyrannique.
Louis Lecoin qui s’est battu toute sa vie pour l’objection de conscience ne craignait pas de déclarer : « Ma non-violence, dans la société de fauves que nous subissons, n’est que théorique[…], elle ne peut m’empêcher d’employer un peu de violence au besoin pour en détruire beaucoup. »
Bakounine penchait pour une violence qu’il est nécessaire d’utiliser mais celle-ci doit être utilisée le moins possible et le moins longtemps possible.
L’ami Jean-Pierre Jacquinot n’était pas partisan de la violence parce qu’utilisée, on ne savait pas dans quel engrenage on mettait les pieds. Et qu’il était souvent difficile d’en sortir.
C’est un peu ce que disait E. Armand. La violence engendre la violence et que l’effort nécessaire pour se mettre à l’abri des réactions, des représailles des violences, perpétue un état d’être et de se sentir qui n’est pas favorable à l’éclosion d’une mentalité antiautoritaire.
Jean Grave lui ne veut absolument pas instaurer son idéal par la force : « Autant l’autorité a raison de se réclamer de la force pour s’installer et se maintenir au pouvoir, autant les partisans de la liberté feraient preuve d’inconséquence s’ils espéraient instaurer leur idéal en l’imposant par la force. »
Et nous pourrions citer bon nombre d’anarchistes connus sur la question de la violence.
Pour notre part, nous nous reconnaissons dans les pensées susmentionnées, en conséquence nous préférons la vie à la mort et aujourd’hui le combat libertaire doit encore et toujours s’effectuer en faveur de la paix, du pacifisme et de l’antimilitarisme. C’est un choix de société que de privilégier le capitalisme guerrier : c’est celui qui fait depuis longtemps. Pour les anarchistes qui désirent une égalité économique et sociale, cette dernière ne peut être obtenue qu’en supprimant les causes de la misère, c’est-à-dire en supprimant le capitalisme, y compris le capitalisme d’Etat.
Goulago (GLJD)