Retrouvons notre ADN syndicaliste révolutionnaire.

Solidarité anarcho-syndicaliste

Retrouvons notre ADN syndicaliste révolutionnaire.

Le syndicalisme révolutionnaire se caractérise par sa capacité à s’auto-administrer et à s’occuper de ses propres affaires, sans intermédiaire, c’est ce que l’on appelle l’action directe et la gestion directe.

C’est sur leur lieu de travail, le lieu même de la production, que les travailleurs s’opposent le mieux au patronat. Les orientations autonomistes des syndicalistes révolutionnaires s’étendent cependant au-delà de la sphère spécifiquement économique : vie culturelle, associative, coopérative… et trouvent naturellement leur place dans l’esprit-type des Bourses du Travail d’avant 1914.

Le terrain économique est le champ de bataille privilégié des syndicalistes bien supérieur comme levier d’émancipation au terrain politique. Lutte de classes, fédéralisme, autogestion font partie intégrante du programme syndicaliste révolutionnaire. Pas question de laisser subordonner l’action syndicale à l’action politique, cette dernière conduisant nécessairement à l’impasse électoraliste et parlementaire.

Au quotidien, si la pratique syndicale qui consiste à obtenir des avantages est bien souvent réformiste, la perspective à long terme de pouvoir gérer la société est, elle, réellement révolutionnaire. C’est aussi en obtenant des avancées concrètes : augmentation de salaire, amélioration des conditions de travail, défense des cas individuels… que l’on devient crédible auprès des travailleurs. Les intérêts de la classe ouvrière et l’action collective de celle-ci s’opposent au système capitaliste ou capitaliste d’Etat. D’où une nécessaire combativité en contradiction avec le paternalisme unificateur des employeurs au sein des entreprises, bureaux, services publics…

La matrice du syndicalisme révolutionnaire demeure souvent sur le plan individuel l’insoumission au système capitaliste et un certain esprit de radicalisation.

Afin de retrouver notre puissance d’attraction, comme ce fut le cas dans de nombreux pays avant 1914 ou en Espagne en 1936, nous devons baser notre fonctionnement sur l’appui mutuel et l’entraide. Nous devons aussi dans les entreprises  redynamiser le poids collectif des salariés dans le processus de production ainsi que leurs capacités de jugement et de critique.

Le syndicalisme révolutionnaire doit redevenir une alternative crédible aux stratégies en cours dans le mouvement ouvrier, stratégies qui nous éloignent de plus en plus des intérêts des travailleurs et de nos idéaux…

De l’histoire du mouvement syndical et politique marquée par les divisions, les scissions et semée de conflits de personnes ou d’orientations à géométrie variable, le syndicalisme révolutionnaire peut tirer profit des faits passés ou en cours. Dissensions, factions, gaspillage de force et de temps, tous ces facteurs concourent à la faiblesse et l’inefficacité du syndicalisme comme arme de classe.

 

Ce n’est pas tant sur le fond que de nombreuses divergences pointent dans le milieu syndicaliste révolutionnaire mais plutôt  sur la forme. Si les fondamentaux comme l’indépendance syndicale, l’action directe…ne posent que peu de problèmes par contre les démarches proposées pour atteindre le but que représente le communisme libertaire sont souvent différentes voire opposées d’où une conflictualité permanente.

Trois points d’achoppement sont à souligner.

  1. Le fait qu’un syndicat égal une voix est-il un principe démocratique ?

Si dans l’histoire de la CGT d’avant la Première guerre mondiale, ce principe était respecté avec les discussions que l’on connaît, on ne peut s’empêcher de constater que les syndicats de l’époque comportaient des milliers d’adhérents. Aujourd’hui, est –il raisonnable de donner trois fois plus de pouvoir lors de votes à 3 syndicats de 5 personnes en comparaison d’un syndicat de 500 personnes. Cela ne laisse-t-il pas la porte ouverte à toutes les dérives et est-ce vraiment démocratique ?

Pour autant, le contrôle par un courant syndical de quelques grandes fédérations si l’on appliquait la règle proportionnelle bloquerait de même toute vie et expression dans une confédération comme cela s’est déjà produit lors du congrès de la CGT en 1946.

Un savant dosage de proportionnalité avec blocage de mandats au-delà de 500 adhérents serait une chose à discuter.

  1. Le permanentat, est-il soluble dans le syndicalisme révolutionnaire ?

Les syndicalistes révolutionnaires se sont toujours penchés sur cet épineux problème. Avant 1914, ce qui était contesté c’était la rééligibilité des fonctionnaires syndicaux. Mais la plupart des permanents à l’époque étaient rétribués en fonction du nombre de syndiqués et quand les effectifs syndicaux chutaient, les permanents se retrouvaient au boulot ou tricards dans les entreprises. Aujourd’hui les permanents représentent un corps professionnel qui asphyxie toute initiative de la base et canalise tout mécontentement ce qui permet à cette élite de plusieurs milliers de personnes de négocier avec le patronat et l’Etat. Ce qui pose problème, c’est la permanence des permanents et le non contrôle de ces permanents inamovibles. Ces bureaucraties indéboulonnables ne peuvent que porter préjudice au mouvement syndical car en côtoyant les hautes sphères patronales et gouvernementales, un certain mimétisme se produit sans compter que le pouvoir est maudit et corrompt. Sans réel contrôle, ces syndicalistes coupés de la réalité du travail ne représentent plus qu’eux-mêmes. D’où le danger de ces représentants appointés essentiellement par des subventions en dehors de tout contrôle militant. D’autant que la plupart des permanents sont cooptés, ce qui ajoute au fonctionnement opaque des centrales syndicales dites représentatives.

Cependant doit-on mettre dans le même sac des camarades qui sont sur le terrain et côtoient au quotidien leurs camarades de travail. Rien n’est moins sûr.

Peut-on se dispenser de permanents techniques dans des professions comme le nettoyage, le bâtiment, la restauration…où des difficultés difficilement imaginables se font jour. Non, bien entendu, à condition que ces permanents techniques soient rémunérés par les cotisations des syndiqués en accord avec eux et non par des subventions étatiques voire patronales. L’autogestion ne suffit pas à tout surtout quand cette autogestion ne peut être appliquée faute de militants suffisamment nombreux, formés et disponibles

  1. Doit-on participer aux élections professionnelles.

Cette participation ne devrait être qu’un moyen et non une fin en soi. Un syndicalisme basé sur des sections syndicales est un gage d’activité pérenne dans l’entreprise, c’est d’ailleurs ce qui différencie le syndicat d’un groupe affinitaire qui fonctionne au gré de l’actualité et non au jour le jour. Protection des militants dans le privé avec des statuts protégés, obtention d’un certain nombre de moyens dans le public, cela est loin d’être négligeable à moins de vouloir s’enfermer dans une tour d’ivoire gage d’une pureté idéologique qui confine à l’immobilisme le plus total. Certes le problème de la délégation de pouvoir ne peut être éludé. Ce problème ne peut-il être contourné par la formation militante, la rotation des tâches quand elle est possible et l’entraide interprofessionnelle ?

Ne vaut-il pas mieux avoir des droits plutôt que d’aller les quémander à d’autres ?

 

Ces sujets méritent débat afin d’une part d’éviter les désillusions et les dérives, et d’autre part sortir du carcan du syndicalisme de secte. Alors voici des idées à creuser et méditer.