Les sales méthodes de la Fédération anarchiste

Bakounine

Les sales méthodes de la Fédération anarchiste

Quand une militante de la F.A nous a appelés au Havre à la mi-décembre 2015 pour nous indiquer que son organisation avait déposé le titre du journal « le libertaire » à l’INPI, on est resté un peu estomaqué pour le moins. La surprise passée, notre premier réflexe a été la colère, celle qui n’est jamais bonne conseillère. Puis nous nous sommes apaisés.

Le compagnon, chargé de la paperasse (dans les organisations très structurées, cela s’appelle le secrétariat), avait enregistré la date de Mai 2016, celle du certificat d’enregistrement, pour effectuer les démarches de renouvellement de la marque « le libertaire ». La F.A. nous a rappelé à l’ordre en amont et ce de manière bien jésuitique.

Cette organisation a commis deux fautes, l’une stratégique et l’autre morale. L’erreur stratégique a été de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Car si l’enregistrement d’une marque produit ses effets à compter de la date de dépôt d’une demande et ce pour une période de dix ans indéfiniment renouvelable, il existe une clause stipulant que : « A l’expiration du délai de six mois durant lequel le renouvellement pouvait être effectué, le propriétaire de la marque dispose d’un délai supplémentaire de six mois pour la renouveler. »

Ce que la F.A. ignorait par ailleurs, c’est que Jean-Pierre Jacquinot avait nommé un exécuteur testamentaire pour reprendre le titre du libertaire et ne pas le laisser à des gougnafiers qu’il ne connaissait que trop bien pour les avoir fréquenté pendant de nombreuses années. Et du haut du saint paradis anarchiste, le Jipé doit bien se bidonner, lui qui avait prévu le coup et nous avait pourtant mis en garde.

La faute morale consiste à essayer de piquer le titre d’un journal qui paraît tous les mois sur le site du libertaire avec quelques numéros hors-série notamment sur l’Affaire Durand. Cette démarche stalinienne de la F.A. n’est pas sans nous rappeler celle des militants communistes à notre encontre, au Havre, pour laminer l’histoire de l’anarcho-syndicalisme dans notre localité et l’évacuer purement et simplement de l’histoire syndicale et de l’historiographie. Peine perdue, depuis 1994 de nombreux livres ont paru sur le sujet. Les staliniens d’un côté et les apprentis spoliateurs de titre de l’autre sont découverts. Peu glorieux ces faits d’arme alors qu’il aurait été si simple de nous contacter pour savoir si nous comptions faire perdurer le titre, si nous avions pris nos dispositions pour éviter que n’importe qui ne s’empare d’un titre historique. Une petite discussion fraternelle, entre gens de bonne compagnie…

Pour mettre les points sur les « i », nous avons effectué les démarches adéquates pour assurer la continuité de notre titre. Nous disons notre titre car le premier numéro du libertaire paru sous l’égide des groupes « Atelier du soir- Germinal-Jules Durand et des individuels de la Fédération anarchiste » date de Mai 1978. Et de fil en aiguille, avec les vicissitudes militantes, le libertaire a continué sous la seule houlette du Groupe libertaire Jules Durand et de quelques individuels anarchistes jusqu’à nos jours. C’est dire la longévité du libertaire tenu par les compagnons du Havre. Cela est d’autant plus méritoire que notre groupe est essentiellement ouvrier et qu’il est plus dur pour un militant ouvrier d’écrire que pour un enseignant ou quelqu’un qui a la plume facile.

Bref, le libertaire n’appartient pas aux accapareurs de titre mais à ceux qui le font vivre depuis plus de 35 ans. D’autant que vous avez déjà un titre de journal, canard qui n’est pas exempt de difficultés, alors occupez-vous de vos propres affaires. Pour être encore plus clair, nous avons participé aux procès contre le patronat local à maintes reprises et nous n’hésiterions absolument pas à croiser le fer sur le terrain judiciaire avec le petit patronat de la F.A.

Les camarades libertaires ouvriers, s’ils ne roulent pas sur l’or, alimentent d’ores et déjà notre caisse à toutes fins utiles en espérant que nous pourrons utiliser ces fonds à des œuvres de propagande plus profitables au mouvement. Dans un premier temps, nous ferons opposition au dépôt du titre du libertaire par la F.A. Cette dernière peut aussi faire amende honorable et se retirer…

Pourquoi, nous éviterons de mener une guerre de communiqués avec la FA sur le net?

D’abord, la Fédération anarchiste ne compte guère plus de 400 adhérents, ce qui fait 20 fois l’effectif de notre groupe libertaire, c’est-à-dire pas grand-chose. Parce que 20 fois pas grand-chose, c’est toujours pas grand-chose. Et les embrouilles entre libertaires n’amusent que nos ennemis fort nombreux et pour cause. D’autre part, nous constatons que la plupart des anarchistes sont aujourd’hui non organisés dans une structure spécifiquement libertaire ou sont structurés ponctuellement dans des associations qui agissent dans des domaines particuliers : écologie, pacifisme, coopération, alternatives diverses…ou des organisations dites « mouvementistes » comme les Zadistes…

La FA telle que nous la connaissons à ce jour  n’est rien d’autre qu’une suite de querelles internes, de scissions récurrentes concernant finalement très peu de personnes mis à part  quelques  petits chefs de coteries politiques  ou de clans familiaux qui ne laisseront finalement aucune trace tangible dans l’histoire des idées et des pratiques anarchistes, tout juste quelques lignes dans le Maitron pour quelques-uns. La FA d’aujourd’hui, celle des spoliateurs, est le pur  produit de cette médiocrité. Nous ne comptons donc pas perdre d’énergie avec cette organisation. Chacun dans son pré et les vaches seront bien gardées.

Se réclamant du fédéralisme, la FA est composée de divers groupes locaux mais fonctionne de manière très centralisée autour de divers secrétariats et administrations, la plupart du temps localisés à Paris. La FA représente de fait un anarchisme français très parisianiste. Ayant coupé court avec ses racines ouvrières, la FA recrute essentiellement dans la fonction publique et divers intellectuels pas toujours issus du sérail. Les moqueurs voient en la F.A d’aujourd’hui, une secte boboïsante. C’est à Paris qu’est édité le journal de la FA, Le Monde Libertaire publié depuis 1954 de façon mensuelle puis hebdomadaire, enfin jusqu’en juin dernier puisque la F.A. est confrontée à une baisse de lectorat et des difficultés de diffusion comme toute la presse militante d’ailleurs. C’est certainement en magouillant et en essayant de voler le titre du libertaire, que la F.A. va stopper ses pertes d’adhérents, ses lecteurs et auditeurs…On en doute, on peut même penser que c’est le contraire qui va advenir : un marasme plus important et des individuels de la FA qui vont certainement condamner les méthodes employées par un polit-bureau qui ne dit pas son nom…On ne doute pas non plus qu’une avalanche de mails assassins va nous parvenir. A Paris se trouve aussi la radio officielle de l’organisation, Radio Libertaire, fondée en 1981 dans la foulée d’une volonté d’expression de radios libres.  Que d’espoirs suscités chez les gogos socialistes que ce Mitterrand, déjà en 1981! Ce paradoxe de la FA, celui d’une fédération de groupes considérés comme décisionnels les uns des autres mais dont une instance centralisée au même titre qu’un parti politique contrôle la ligne  nationale et est chargée de l’exécutif formel et des plus gros outils de communication même si certains groupes locaux y participent. Bref, c’est ce fonctionnement qui a occasionné une première scission en 1979 avec nos compagnons autour de Maurice Laisant et du libertaire. Déjà, la dérive partidaire et centralisatrice y était dénoncée.

Aujourd’hui, la FA compte pour du beurre dans les mouvements sociaux sauf exceptions qui confirment la règle. Si  la FA représente la vitrine officielle de l’anarchisme en France, c’est que les autres organisations font de même, pâle figure, et ne représentent plus grand-chose, le groupe libertaire Jules Durand y compris, mais ce n’est qu’un groupe local, pas une organisation nationale. De nombreux camarades libertaires ont quitté durant ces trente dernières années cette petite structure qu’est la F.A. pour participer à un  développement d’actions qui semblent plus concrètes, moins frustrantes, en dehors de cette organisation politicienne qu’est devenue leur Fédération anarchiste.

Nous sommes bien contents d’avoir, depuis 1979, continué notre petit bonhomme de chemin sans avoir participé aux éternelles querelles de chapelle de cette organisation sclérosée et non attractive. Depuis le début des années 2000,  de nombreuses polémiques ont encore émaillé la vie de la F.A. Nous ne comptons pas revenir là-dessus mais la scission ayant abouti à la création de la C.G.A. (Coordination des Groupes Anarchistes) fait partie de cette vie trépidante d’organisation qui passe davantage de temps à discuter stratégie interne pour garder le pouvoir qu’à mener campagne pour défendre les idéaux libertaires.

Et nous ne doutons pas que l’actuelle F.A. va encore se diviser, tout comme la CGA s’est récemment scindée, elle aussi. Au libertaire, on ne vous a rien demandé et nous vous conseillons de bien réfléchir aux conséquences et à l’issue du conflit que vous avez initié en essayant de nous extorquer notre journal.

G.L.J.D.

LibN°1

Circulaire N°1