Les réflexions et actions anarchistes n'ont pas de frontières

Autodestruction de la planète

Il est temps de dire que nous avons trop privilégié la lutte de classes pour faire renaître/revivre un anarcho-syndicalisme ou un syndicalisme révolutionnaire qui n’existe plus aujourd’hui qu’à l’état de témoignage. Cet investissement militant fut réalisé, en vain. Nous avons essayé, pour certains d’entre nous durant une quarantaine d’années pour les résultats que l’on connaît, même si ponctuellement quelques réussites ont pu être mises à notre actif, de nous investir dans le champ syndical à la CGT ou à la CNT. Nous n’avons pas d’amertume de constater cela, ainsi va la vie. Nous répétons depuis quelque temps que la lutte sur le terrain social devra s’exercer  avec une finalité écologique. Quelques camarades nous disent :   «  Vous prenez le train de l’écologie en marche ». Que nenni ! Il nous suffit de ressortir nos photos d’archives. Dans les années 1977-1980, plusieurs libertaires havrais, mais pas qu’eux, ont participé à des manifestations anti-nucléaires à La Hague et à Paluel. En 1979, certains d’entre nous étions à Kalkar (Allemagne)… A la même époque, nous avions manifesté contre les marées noires en Bretagne (Amoco Cadiz…). Et dans les années 1980, deux de nos militants (retraités aujourd’hui) ont effectué un périple cycliste du Havre à Nantes en passant avant par le Morbihan. C’est dire qu’on n’a pas attendu « la mode du vélo » pour en faire. De même, nous avons participé à une campagne pour les transports gratuits au Havre…transports qui, il faut bien le dire, ne sont guère utilisés par les militants, quelle que soit l’obédience politique.

Donc, plutôt que d’un tournant, il faut plutôt considérer notre attitude comme un retour aux sources pour les plus anciens. Nos principes anarchistes sont toujours valides et opérationnels, ici et maintenant. On ne peut pas proposer un autre futur sans justement lutter pour que ce futur puisse exister alors que les catastrophes climatiques arrivent en cascade avec les conséquences que l’on connaît, sans compter la pollution qui tue des dizaines de milliers de personnes chaque année. Quant aux plus jeunes, nous leur disons que le syndicalisme peut être utile d’un point de vue corporatif mais en aucun cas il ne sera une alternative au système économique actuel. Il nous suffit d’analyser l’état du syndicalisme actuel. A peine 8% de syndiqués en France et si on regarde de plus près, le secteur privé est à 2%. Les grandes boîtes qui ont un Comité d’Entreprise limitent la casse sur le plan de la syndicalisation. Et encore. Sinon, dans les PME et les TPE, c’est le désert syndical. Chez les enseignants qui avaient un fort taux de syndicalisation, il y a une cinquantaine d’années, le déclin continue inexorablement comme dans toute la Fonction publique. Cela se traduit même par des taux d’abstention de 50% lors des élections professionnelles chez les enseignants du primaire. Bien au-dessus des dernières élections dans les TPE : 5,4% de participation ! Une abstention abyssale. Et l’Etat valide la représentativité syndicale sur les résultats des processus électoraux. De plus, les syndicats sont divisés et chaque parti politique y va de son organisation pour mettre sous sa coupe l’organisation syndicale. Le parti ouvrier indépendant (anciennement PT, PCI, OCI…) gangrène F.O. Les néo-staliniens sont toujours à la manœuvre à la CGT. NPA, UCL investissent les SUD. Les sociaux- démocrates de la CFDT s’engouffrent  dans le « pacte pour le pouvoir de vivre » avec Nicolas Hulot…Les syndicats, minoritaires dans le monde du travail, sauf exceptions (Dockers…), en manque d’unité, sans projet alternatif de société, vivent de leurs rentes étatiques et patronales. Un syndicalisme qui dépend essentiellement des subsides du patronat et de l’Etat pour leurs frais de fonctionnement et de permanentat, est un syndicalisme godillot, moribond voire traître à sa classe. La collusion de certains syndicalistes avec les patrons n’est plus à démontrer notamment pour ceux et celles qui négocient, tout en dépendant des finances patronales. CQFD. Les partis politiques ont une lourde responsabilité quant à la désaffection syndicale. Les querelles de clocher de politiciens, les syndicats courroies de transmission des partis…ont eu raison du syndicalisme via la partition de ce dernier en plusieurs mini-confédérations. Et les anarchistes avec plusieurs CNT ne sont pas en reste.

Certes le salariat a évolué ; certes l’externalisation de secteurs d’entreprises et l’ubérisation ont fragmenté et fragilisé tout un pan de salariés…Les grèves ne font plus recettes et à part les secteurs des transports (cheminots, routiers, dockers, pilotes…), pas grand-chose ne bouge. La crise sanitaire va encore creuser le fossé entre les salariés et l’armée de permanents des syndicats dits « représentatifs ». Le mouvement des gilets jaunes a montré que d’autres formes de protestation étaient possibles sans perdre d’argent et en maintenant un fonctionnement horizontal. Pour ces raisons mais il y en a bien d’autres, nous pensons que le syndicalisme est voué à l’impuissance sauf lors de confrontations ponctuelles dans certains secteurs où il existe un rapport de force ou lors d’un conflit qui concerne un grand nombre de personnes comme pour la défense de la Sécu ou des retraites. Mais à terme, sauf sursaut unitaire très peu probable, le syndicalisme va continuer à péricliter.

Pour autant, pas de pessimisme, les anarchistes sont plein de ressources. Des initiatives européennes sinon mondiales peuvent voir le jour sur le plan écologique car la pollution, le réchauffement climatique, la déforestation, la biodiversité…n’ont pas de frontières. Nos réflexions et actions non plus.

Ti Wi (GLJD)