Il n'y a pas d'anarchie sans écologie.

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La pensée anarchiste contient les différents courants dans lesquels se trouve le long chemin de la liberté. Ce sont des flots qui coulent comme des rivières dans la mer de la liberté, fondues et confondues en une seule libération.

Nous ne parlons pas parler d’anarcho-environnementalisme mais d’environnementalisme anarchiste, car l’environnementalisme se conjugue de différentes manières, certaines d’entre elles sont clairement opposées.

Mais il n’y a pas d’anarchie sans écologie. Dans la pensée de certains des anarchistes les plus connus du XIXe siècle, nous trouvons des élaborations profondément claires sur les relations entre libération des êtres humains et respect, sauvegarde mais aussi libération (des menaces de la civilisation, de la domination et de la voracité du Capital) dans le respect aux autres êtres vivants et à la nature (ou à l’environnement). Henry David Thoreau aux États-Unis était le champion d’un retour à la nature au sens le plus concret, comme un rejet de la vie moderne perturbatrice, et une fusion de l’individu avec la nature ; Élisée Reclus conjuguait la géographie au sens libertaire, comme discipline de découverte et de connaissance d’un monde sans frontières fait d’environnements divers et de peuples en harmonie ; Pierre Kropotkine n’a cessé de lier l’entraide entre les animaux au besoin de solidarité pour prévaloir entre les humains comme forme de résistance et non de domination. Après eux, de nombreux penseurs et propagandistes anarchistes ont pris en compte ces principes dans leurs élaborations et actions pour changer la société de l’exploitation de l’homme sur l’homme, et de l’homme sur la nature, convaincus que tous deux font partie de l’Unité. L’un d’eux – mais pas le seul – Murray Bookchin, s’est penché sur une écologie de la liberté, influençant la façon de penser et d’agir de nombreux militants à travers le monde.

Ces dernières années ont vu émergé de nombreuses données sur les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, sur le réchauffement climatique et sur l’échec des accords de Paris (COP21) de 2015. Les Etats n’ont pas su trouver un moyen sérieux et efficace d’arrêter l’empoisonnement irréparable au CO2 qui s’empare de la planète à cause des « activités humaines » ; en réalité c’est l’action constante du capitalisme et des Etats qui gaspillent des ressources, privant la Terre de ses défenses et émettant des contaminations de toutes sortes afin d’accumuler pour le compte d’une minorité le maximum d’avantages et de profits.

C’est une opinion largement répandue, même parmi des personnalités gravitant dans les échelons supérieurs de la politique et de l’économie, que sans mesures radicales, la maladie mortelle que le capitalisme inflige sur Terre ne sera pas résolue.

Et ces mesures radicales ne peuvent venir que d’une pensée radicale, une pensée qui va à la racine du problème, qui ne se limite pas à identifier des solutions plug-in qui, au mieux, tentent d’atténuer les effets, d’effleurer la surface ; mais, au contraire, elles peuvent influencer les causes qui génèrent le problème : la survie de la vie sur la planète Terre. Et cette pensée est, sans aucun doute, l’anarchisme.

Le capitalisme et les États, avec leur plus grand triomphe au cours des deux derniers siècles, sont à l’origine de la maladie la plus grave de la planète. Ils ont poussé l’exploitation de la nature à l’extrême, conséquence de l’exploitation humaine qu’ils ont théorisée et pratiquée. Ils ont fait de la domination l’idéologie prépondérante, sacrifiant tout, les gens, les animaux, l’environnement, pour satisfaire la voracité d’une minorité de riches déchaînés. Nous ne devons attendre aucune solution de qui est à l’origine du mal qui afflige le monde. Leurs propositions et leurs actions ne sont que des pièges mystifiants : l’« économie verte », qui ne met qu’un masque souriant et rassurant sur les fossoyeurs de la Terre et les comptables du marché mondial. Le développement durable voudrait montrer une possibilité de continuer avec une destruction de l’environnement et l’exploitation humaine plus acceptable. Ce n’est qu’un oxymore ;  le biocapitalisme, ce grand monstre qui aveugle la raison et, tandis que d’un côté il canalise les consommateurs avec la bonne conscience des supermarchés mondiaux où se consomme le spectacle quotidien de la marchandisation et de l’aliénation, par un autre asservit et soumet des millions de personnes, les privant des biens les plus élémentaires nécessaires, en plus de la liberté, en utilisant les forces armées, l’extorsion économique, la corruption et d’autres instruments de persuasion psychologique de plus en plus sophistiqués et cachés.

L’écologisme classique, celui que l’on a connu ces trente dernières années, celui du « soleil rieur », né antinucléaire et devenu social-démocrate en raison de sa compatibilité déclarée avec le système économique de type occidental, n’a aucune possibilité d’apporter des changements substantiels. Ce n’est pas par hasard qu’il a fini par être une béquille pour le système capitaliste, obtenant un lifting s’il en est.

La pensée radicale aujourd’hui peut nous aider à comprendre les liens entre l’absence de solutions au problème des déchets et l’organisation autoritaire des partis, entre une saison avec une chaleur record et un système d’exploitation des ressources sans précédent dans l’histoire humaine et qui s’appelle le capitalisme ; entre un hamburger, les ventes d’Amazon, un trou dans la couche d’ozone et des calamités considérées comme des phénomènes « naturels » qui forcent des millions et des millions de personnes à l’exode. La pensée radicale peut nous faire comprendre à quel point l’exploitation des hommes et des femmes est similaire et imbriquée sur le lieu de travail, avec l’agriculture intensive ; combien une société autoritaire est le déni même de l’environnement étant autorisé pour la défense avec tous les moyens du droit de quelques-uns à piller pour l’accumulation de capital dans leurs propres mains. Une pensée radicale explique comment le patriarcat, qui soumet les femmes, et l’autoritarisme, qui soumet toutes les espèces vivantes, ont les mêmes origines dans le pouvoir, dans l’exercice de la domination, et qu’il ne peut y avoir libération d’un seul élément par rapport à tous les d’autres, mais que tous les éléments doivent se soutenir mutuellement pour la libération de la société.

Une société égalitaire, c’est-à-dire sans privilèges, sans Etats, sans pouvoir, est une société consciente que le monde est un et doit être respecté pour tout ce qu’il représente : arbre ou fleuve, montagne ou lac, animal ou personne ; sans harmonie entre tous les éléments et dans tous les éléments, il ne peut y avoir de libération effective.

Bien entendu, les méthodes adoptées doivent aussi être cohérentes avec ces finalités, elles doivent les contenir, les faire siennes, être leur expression cohérente.

TI Wi (GLJD)