Grand remplacement ou grand retournement

Art nuit bêtise

Grand remplacement ou grand retournement

Tocqueville, chantre de l’idée égalitaire, pense qu’il y a une similitude entre les hommes et une commune appartenance au genre humain. Il privilégie ce qui rapproche, rassemble les gens et non ce qui les sépare et les distingue. Pour lui, l’idée égalitaire fait son chemin : position sociale, âge, sexe et couleur de peau ; dans l’autre, il voit son égal et son semblable : « Les génies les plus profonds et les plus vastes de Rome et de la Grèce n’ont jamais pu arriver à cette idée si générale, mais en même temps si simple, de la similitude des hommes et du droit égal que chacun d’eux apporte, en naissant, à la liberté ; et qu’ils se sont évertués à prouver que l’esclavage était dans la nature, et qu’il existerait toujours. » (De la démocratie en Amérique)

La démocratie grecque qu’on nous a présentée comme idéale était pourtant basée sur la loi du plus fort et de l’esclavage. Les citoyens libres pouvaient discourir à loisir pendant que les esclaves trimaient pour eux.

La démocratie aujourd’hui, si elle a fait des progrès, n’est pourtant pas exempte de reproches. Est-ce vraiment le meilleur système politique ?

Très certainement pour les élites et les groupes qui ont réussi. Un peu moins pour les esclaves salariés, les chômeurs et le quart monde.

L’idée égalitaire d’un point de vue démocratique, même drapée de beaux principes, est une fable que l’on raconte pour endormir le peuple.

Comme l’indique le bandeau de notre blog : «  Tous les animaux sont égaux… mais il y en a qui le sont plus que d’autres… ». On pourrait ajouter que les hommes sont plus égaux que les femmes, les Blancs plus égaux que les Noirs… Malgré l’égalité politique, puisque les femmes ont le droit de vote depuis 1944, il n’est que de constater les différences de salaires, conditions de promotion, les difficultés à trouver un emploi à taux plein, le nombre de femmes aux responsabilités politiques et économiques…Donc la démocratie traîne des pieds. Non seulement, elle traîne des pieds mais c’est un système qui sous couvert d’universalité et de progrès, de nobles idées, permet aux nantis de se reproduire et de consolider leurs positions sociales. Nous sommes loin de l’idée égalitaire des libertaires.

C’est pour cela que Marine Le Pen n’a pas plus de difficultés que cela à se présenter comme démocrate. L’extrême droite lui emboîte le pas. Elle s’approprie même des concepts comme la laïcité qui devient dans sa bouche une arme contre les musulmans. La gauche n’est plus que la pâle copie de ce qu’elle était dans les années soixante. Où est passé le CNAL ? Où sont passées les Amicales laïques ? Dans quel état de décrépitude se trouve la gauche après ses accès au pouvoir…On pourrait dire de même que les libertaires se sont repliés dans un cocon élitaire et affinitaire. Que de gâchis tout cela. La course au pouvoir entre clans rivaux nous a amené à la dérive et au renforcement des idées d’extrême droite sur le terrain de la pensée. Les libertaires ont aussi leur part de responsabilité dans cet état de fait.

Ce qui est curieux, pour le moins, c’est que ce sont de nouvelles élites, qui parlent au nom du peuple, qui s’en prennent à d’autres élites. Ce sont les chaises musicales de la politique politicienne.

La Zemmour-mania orchestrée par les médias n’a pas d’équivalent à gauche. Le seul qui avait pignon sur rue, Michel Onfray, vient de se voir « congédié » de France Culture qui retransmettait les cours du philosophe dispensés lors de son Université Populaire. Macron qui prétendait stopper la dynamique néo-réactionnaire, vient au contraire de faire le lit de celle-ci. L’extrême droite vampirise les réseaux sociaux, installe des librairies, diffuse des journaux vendus en kiosque, soutient des écrivains, forme des gros bras dans des salles de sport…Tous les ingrédients à la Gramsci pour gagner la bataille des idées et les imposer plus tard par la force. L’extrême droite a toujours existé en France mais depuis la Seconde Guerre mondiale, on ne la voyait guère briller après s’être vautrée dans la boue collaborationniste. Elle reprend du poil de la bête car elle s’appuie sur une islamophobie ancrée dans l’opinion publique. Que la TV nous montre l’Aquarius avec des migrants en situation de souffrance et les gens pensent que l’Europe va être envahie, submergée par un tsunami de migrants. Que les informations nous parlent de terrorisme et l’opinion publique voit l’islamisation qui prend racine dans les quartiers.

L’extrême droite gangrène le terrain de la pensée. Il est encore temps d’inverser cette tendance en inventant d’autres possibles comme les ZAD, d’autres futurs aux valeurs humanistes. La démocratie a failli ; l’humanisme libertaire, le municipalisme libertaire, l’anarcho-syndicalisme, l’écologie libertaire…sont autant de pistes à explorer pour rééquilibrer les rapports de force en faveur du progrès social, de l’entraide et du respect de tous les êtres humains, nos frères.

Patoche (GLJD)