Fabien Roussel et le bifteck

En avant

Pour faire suite aux paroles de Fabien Roussel, candidat du Parti Communiste à la présidentielle de 2022, prêt à « défendre le bifteck des Français », pour qui la gastronomie française c’est « un bon vin, une bonne viande, un bon fromage » … Nous avons choisi de publier un article d’Ecologistes en Action (Espagne) à propos de la consommation de viande:

Pour une consommation consciente, responsable et durable de la viande

« Ecologistes en Action » valorise positivement le débat public sur la production et la consommation d’élevage industriel dans le contexte actuel de profonde crise environnementale.

L’organisation environnementale propose des données et des propositions, dans une perspective rigoureuse et scientifique, sur les produits de l’élevage industriel, leur qualité et leur santé, les alternatives et la consommation acceptable de viande.

Consommer est un acte politique qui s’accomplit au quotidien ; l’entière responsabilité des changements ne peut être imputée à la consommation plutôt qu’à la production.

Si quelqu’un doutait que consommer soit un acte politique, la polémique suscitée ces dernières semaines autour des déclarations du ministre de la Consommation à propos de l’élevage industriel le confirme encore. « Ecologistes en Action » considère que le débat suscité a été très positif pour que les citoyens s’expriment et s’informent sur une question aussi importante pour un avenir durable que la production et la consommation de viande.

Dans ce contexte, l’organisation environnementale souhaite contribuer à ce débat de société avec la publication des données et propositions suivantes concernant la consommation de viande :

1. Sur la sécurité alimentaire des viandes industrielles

En principe, il ne peut y avoir aucune trace d’hormones et d’antibiotiques dans la viande qui arrive sur le marché, car ils sont strictement interdits. Cependant, les antibiotiques sont souvent utilisés de manière systématique ou préventive. La surpopulation dans des conditions non naturelles et très stressantes pour les animaux nécessite l’utilisation d’antibiotiques pour les maintenir en bonne santé dans ces conditions.

L’élevage industriel est le principal consommateur d’antibiotiques dans le monde. En Espagne, les trois quarts de tous les antibiotiques du pays sont utilisés pour le bétail.

Des études récentes ont confirmé la présence dans les eaux des zones d’élevage industriel de résidus d’antibiotiques et de superbactéries résistantes à ceux-ci. C’est l’un des plus grands dangers pour la santé humaine.

2. Sur la qualité de la viande industrielle

Pour parler de qualité, il suffit de rappeler les différentes qualités du jambon Serrano, tant sur le plan nutritionnel qu’organoleptique (goût, odeur, texture). Cela dépend en grande partie de ce que cet animal mange et des conditions dans lesquelles il vit.

Parier sur des alternatives de qualité, comme l’élevage extensif, doit aller de pair avec la réduction de la consommation de viande. Il ne s’agit pas seulement de substituer une viande à une autre, mais aussi de s’interroger sur les quantités de protéines animales consommées.

3. Sur la consommation de viande et la santé

La consommation de viande rouge et transformée est associée à une série de maladies liées au cancer colorectal, à l’obésité, à la santé mentale, au diabète de type II, aux maladies cardiovasculaires, aux maladies intestinales (diverticulite), aux maladies chroniques du foie ou à la mort prématurée. Des études comme celles de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le certifient.

La FAO recommande de consommer au maximum 300 grammes de viande (si elle est rouge, 200 ; les autres, jusqu’à 500) par semaine et par personne.

L’Agence espagnole de sécurité alimentaire et de nutrition propose une consommation maximale de 2 à 4 portions (100 à 125 grammes) par semaine de viande, de préférence du poulet ou du lapin, et pas plus de 2 portions par semaine de viande rouge.

Le rapport sur la consommation alimentaire en Espagne 2020 du ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation inclut une consommation par an et par habitant de plus de 50 kg, qui selon d’autres sources s’élève à 100 kg.

Dans l’ensemble, la consommation de viande en Espagne est deux à quatre fois supérieure aux recommandations sanitaires et écologiques.

4. Que peut-on et doit-on faire de la consommation consciente

Assumer une attitude citoyenne de consommation consciente, responsable ou durable.

Arrêtez de rejeter le gros du blâme sur les consommateurs. La consommation n’est pas ce qui détermine la production, mais c’est généralement le contraire : ce sont les décisions dans la structure productive qui établissent les modes de consommation par la publicité et la dissimulation d’alternatives.

Nous sommes dans un monde globalisé, où une alimentation saine est inabordable pour plus de 3 000 millions de personnes et où près d’un tiers de la mortalité est due à un type de malnutrition. Une alimentation avec un rôle prépondérant de la viande réduit les possibilités d’une alimentation saine, durable et universelle.

Le véganisme, le végétarisme et le flexitarisme sont trois options éthiques, saines et durables, encadrées autant que possible dans l’agroécologie. Au sens large, les flexitariens seraient ceux qui ne dépassent pas 2-3 portions de 125 grammes ou 400-450 grammes au total par semaine. Le régime méditerranéen de toute une vie serait une concrétion du flexitarien.

Des données encourageantes : selon le rapport « La révolution verte », aujourd’hui 7,9 % de la population espagnole se considère flexitarien, 1,5 % végétarien et 0,5 % végétalien. Ce sont des chiffres qui ne cessent de croître.

5. Ce que « Ecologistes en Action », dans la lignée de la déclaration de la plateforme Stop Industrial Livestock, demande au Gouvernement et aux législateurs :

Déclaration urgente d’un moratoire sur l’expansion ou l’approbation de nouvelles fermes d’élevage intensif.

Politiques spécifiques visant la disparition progressive de l’agriculture industrielle.

Des politiques résolues de soutien à l’élevage extensif, seule alternative véritablement durable.

Mettre fin à toutes les subventions et allégements fiscaux pour l’élevage industriel.

Augmentation notable du contrôle et de l’inspection des opérations industrielles.

Des réglementations de bien-être animal moins tolérantes et plus exigeantes, et l’obligation de les respecter.

Etiquetage des viandes d’élevage extensif avec son propre sceau spécifique.

Réglementation exigeante de la publicité dans toute l’industrie alimentaire, en particulier celle destinée aux enfants et aux adolescents.

Des politiques qui favorisent une alimentation dans les restaurants et les cantines publiques où prédominent les produits végétaux, écologiques et locaux.

 

Du point de vue anarchiste, bien sûr, il est illusoire de demander aux gouvernements et aux législateurs de changer de braquet. Nous savons pertinemment que les politiciens n’accordent que ce que nous sommes capables d’exiger par un rapport de force. Si de plus en plus de personnes vont dans le sens d’Ecologistes en Action, l’opinion publique évoluera dans un sens positif et en France, les prises de conscience de l’opinion publique précèdent la loi contrairement à certains pays anglo-saxons. Même adeptes d’Elisée Reclus qui ne mangeait pas de viande, nous considérons que la défense de l’environnement nécessite une consommation de viande nettement moindre et qu’un régime flexitarien valorisé peut être une solution intermédiaire au tout carnivore. En clair, manger beaucoup moins de viande mais tracée et de meilleure qualité.

David (Nice) pour le libertaire