Nous désirons pour l’honneur et le salut des sociétés ouvrières que les revendications ouvrières restent toujours préservées de la corruption du parlementarisme

En avant

Que ce soit la droite ou l’extrême droite (Sébastien Chenu…), tous les politiciens de ce bord y vont de leur couplet : la réforme des retraites passera car les Français sont résignés. Mais pour des gens résignés, il y en a du monde dans la rue : 3 millions le mardi 7 mars 2023.

Macron  via les parlementaires veut faire passer sa réforme. Pour ceux et celles qui avaient des doutes sur le parlementarisme, les voilà édifier.

Déjà, nos compagnons de la Fédération jurassienne, en 1872, mettait en garde les travailleurs sur le suffrage universel et le parlementarisme:

« Or, nous l’avons toujours dit et nous le redisons, le suffrage universel ne deviendra une chose sérieuse qu’à une condition : la conquête préalable de la liberté et de l’égalité. Dans une société composée de patrons et de salariés, de capitalistes et de prolétaires, ceux-là seuls qui possèdent sont libres ; le grand nombre ne connaît la liberté que de nom, et se trouve, malgré les déclarations de la loi, dans un état d’assujettissement, qui empêche son vote d’avoir une valeur morale.

« Le vote est une arme légale et les armes légales servent à nous duper, à nous opprimer, – jamais à nous donner la victoire. »

« Nous savons que tout pouvoir politique, fût-il décoré des formes les plus républicaines et démocratiques, est et restera toujours un droit exclusif de la minorité privilégiée, un joug pour le peuple. »

« Nous désirons pour l’honneur et le salut des sociétés ouvrières que les revendications ouvrières restent toujours préservées de la corruption du parlementarisme. » etc. etc.

Les choses n’ont guère changé depuis les débuts de l’Internationale anti-autoritaire.

Mais l’avenir n’est jamais écrit et tout peut arriver. Le meilleur combat contre l’extrême droite serait que la grève reconductible s’installe dans la durée car Marine Le Pen n’est pas très à l’aise avec les grèves et « les désordres » qui peuvent les accompagner. Du bout des lèvres, espérant capter  l’électorat populaire, elle soutient les mobilisations « pacifiques ». Et si la France est bloquée, c’est la faute non à Voltaire mais à Macron. Jordan Bardella joue sa partition d’homme d’ordre contre les blocages qui nuiraient aux Français. Double discours d’équilibristes patentés.

Alors faisons en sorte que les hypocrites sortent du bois. D’une pierre deux coups : un coup contre les réacs, un coup contre Macron et les libéraux. Et la gauche, on ne lui fait pas davantage confiance.

Le sénat a eu beau voté l’index séniors, la fin des régimes spéciaux…C’est au final la rue qui décidera. Il faut que les travailleurs fassent leurs affaires eux-mêmes. Plusieurs Fédérations syndicales de la CGT continuent la grève : Ports et Docks, Chimie, Energie, Transports et localement des blocages se font jour, des grèves aussi.

D’ores et déjà, la CFDT offre une porte de sortie au gouvernement ; ce dernier est invité à retirer le passage de 62 ans à 64 ans. C’est tout et retour à la case départ. Toutes ces journées de mobilisation pour ça ? Peut-on se satisfaire d’un statu quo ? Certains nous disent que oui. D’autres qu’il faut pousser plus loin car la pauvreté gangrène la société française : 10 millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté. L’inflation….Mais comment mobiliser encore davantage et mieux.

Pour cela, il faut s’affranchir des corporatismes. Nos anciens avaient compris le piège du corporatisme :

« L’égoïsme corporatif joue aussi un rôle considérable encore dans les revendications ouvrières, et il faut, coûte que coûte, à moins que les sociétés ouvrières ne veuillent trahir leur mission, faire disparaître de leur sein les tendances étroitement corporatives ; l’esprit d’une solidarité générale, largement pratiquée, doit pénétrer toute l’action des ouvriers. »

« Que les sociétés ouvrières, si elles s’enferment dans l’égoïsme collectif du métier, loin de contribuer à l’affranchissement du prolétariat, ne tendraient qu’à former, comme l’a déjà craint le Congrès international de Lausanne de 1867, un Quatrième Etat laissant en dehors de lui un cinquième Etat plus misérable encore. » (Fédération jurassienne-1872)

Certes des camarades nous disent que si les corporations de secteurs névralgiques qui ont un poids économique peuvent faire plier le gouvernement Borne, c’est toute la réforme qui tombe à l’eau. Une espèce de ruissellement syndical pour tout le monde. Mais on a déjà vu des corporations ne défendre que leurs intérêts.

Cela étant dit, ce ne sont pas les partis de « gauche » qui sont à l’initiative des mobilisations de masse de ces dernières semaines. C’est l’action économique qui permet de regrouper le maximum de personnes. Action économique, oui, car les questions économiques sont la base de la société humaine. Les politiciens eux, ne vivent que des joutes électorales.

Quel rôle peuvent tenir les libertaires dans la situation actuelle ? Eh bien, éviter que les syndicats ne s’érigent en conservateur et protecteur de l’ordre social. Cet ordre social nous est défavorable ; il faut le changer. Eviter aussi que les syndicats ne canalisent le ras-le-bol des travailleurs pour nous faire retourner à l’usine, à l’école, au bureau, à l’hôpital… L’Etat a déjà la police, l’armée pour maintenir l’ordre, qu’on n’y rajoute pas l’ordre syndical au profit du patronat. Les syndicats réformistes organisent une opposition de façade à Macron. On est loin d’une demande d’égalité économique et sociale pour tous les travailleurs.

Samedi 11 Mars 2023, une autre mobilisation est appelée à nouveau pour faire le lien avec les secteurs grévistes. Mais il va arriver le moment où les salariés vont œuvrer en marge de la légalité à défaut d’être entendus. D’autres vont s’énerver…Gageons que l’Etat utilisera la force brutale de la répression pour couper court à toute situation qu’il ne maîtriserait plus. Mais essayons quand même autre chose, pour ne plus subir la prédation étatique et patronale.

Patoche (GLJD)